La polémique sur l’éventualité d’un troisième mandat, contesté dans la plupart des cas, n’aura pas lieu au Bénin. C’est ce qui ressort des récentes évolutions de l’actualité politique dans le pays, à moins d’une année de l’organisation de l’élection présidentielle. Si les professions de foi de certains politiciens, avides de pouvoir, sous nos cieux, surtout en période électorale, ne sont pas souvent prises au sérieux, le Président béninois, Patrice Talon, est en passe de démontrer tout le contraire.
On le sait, M. Talon, actuel locataire du Palais de la Marina de Cotonou depuis 2016, achève son second et ultime mandat, selon les dispositions constitutionnelles du pays. Il l’a répété à maintes reprises et personne ne le croyait : pas question pour lui d’en briguer un troisième. Ainsi, s’inscrivant dans une dynamique de la parole donnée, il a désigné son successeur pour briguer la magistrature suprême, à l’élection présidentielle du 12 avril 2026. Cette désignation, à laquelle très peu s’attendait, est intervenue à l’issue d’une rencontre des partis politiques de la mouvance présidentielle, notamment le Bloc républicain (BR) et l’Union progressiste pour le renouveau (UPR). A l’unanimité, c’est Romuald Wadagni, l’actuel ministre d’Etat, chargé des Finances et de la Coopération qui a été choisi pour succéder au Président Talon.
A la tête du ministère de l’Economie du pays, depuis près d’une dizaine d’années, ce natif de Lokossa, au Sud-Ouest du Bénin, âgé de 49 ans, a su implémenter avec rigueur d’importantes réformes qui ont façonné la gouvernance globale du pays. Toute chose qui aura impacté, de ce qui se dit, positivement sa transparence budgétaire, selon les institutions finan-cières internationales. En attendant, le 12 avril 2026, date à laquelle le peuple béninois sera appelé aux urnes, ils sont nombreux à espérer que le dauphin désigné ne subisse pas le « cas de force majeure » comme ce fut le cas dans d’autres contrées.
Mais, au-delà, le choix de Romuald Wadagni pour succéder aux destinées du pays interrogent certains observateurs de la scène politique béninoise. Quelles sont, en effet, les chances de l’homme sur qui le président sortant fait confiance ? Qu’est ce qui sous-tend ce choix de cet expert-comptable chevronné au chevet de l’économie béninoise depuis 2016 ? Ce sont là, autant de questions qui taraudent les esprits avisés, dans le cadre des prochaines élections présentielles.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Patrice Talon aura tenu parole, levant le doute sur ses intentions et hissant ipso facto le niveau de la démocratie béninoise. Pour certains, en choisissant ce diplômé de Harvard Business School et de l’université de Grenoble, en France, et habitué des institutions de Bretton Woods, Patrice Talon entend faire de la stabilité économique une continuité pour la consolidation des acquis. Pour y parvenir, Romuald Wadagni devra, en intelligence avec l’ensemble de la mouvance mettre toute l’expérience reçue auprès de son mentor Talon et travailler à adopter une carrure politique. Cela, pour avoir l’adhésion de toute la classe de la mouvance autour de ses idéaux.
C’est l’une des conditions sine qua non pour réussir cette succession dans ce pays où de nombreux défis dans plusieurs secteurs l’attendent. Car, en considérant les forces en présence dans le landerneau politique national, tout semble être en sa faveur pour briguer haut les mains, le fauteuil présidentiel. Cela d’autant plus qu’en face, aucune figure politique consensuelle de l’opposition n’existe pour le moment pour lui barrer la voie. Il revient donc à l’opposition d’opérer vite le choix de son candidat qui, du reste, est très attendu par l’opinion publique. Les prochains jours nous édifieront davantage sur les candidats en lice à cette élection présidentielle qui écrira une fois encore l’histoire du pays.
Soumaïla BONKOUNGOU