L’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) a retrouvé le chemin de la sagesse collective. En confiant, le 6 octobre 2025, la présidence tournante de son Conseil des ministres au Burkina Faso, l’organisation régionale renoue avec l’esprit d’équité et de respect mutuel qui a toujours fondé son existence. Ce geste institutionnel, intervenu après les tensions de la session du 11 juillet dernier à Lomé, où le Burkina Faso, le Mali et le Niger avaient quitté la salle pour protester contre un refus jugé arbitraire, sonne comme une réconciliation et un retour à la raison.
Au-delà de l’événement protocolaire, cette décision marque un tournant symbolique dans
les relations régionales ouest-africaines. Elle réaffirme que le dialogue et le respect des statuts communs doivent toujours primer sur les calculs politiques. Car l’article 11 de l’Union est clair : « la présidence du Conseil des ministres est tournante, pour deux ans, entre les pays membres ». En rétablissant le Burkina Faso dans son droit, l’UEMOA vient corriger une entorse qui menaçait sa cohésion et sa crédibilité institutionnelle.
Ce geste est d’autant plus salutaire qu’il intervient dans un contexte de recomposition politique et diplomatique en Afrique de l’Ouest.
Les pays de l’Alliance des Etats du Sahel (AES) que sont le Burkina Faso, le Mali et le Niger, affirment de plus en plus leur volonté de souveraineté et d’émancipation institutionnelle, après avoir pris leurs distances avec la CEDEAO. Face à cette dynamique, la tentation de l’exclusion aurait été une faute stratégique. C’est en intégrant, et non en marginalisant, que l’UEMOA préservera sa pertinence historique.
Au plan économique, ces trois Etats sahéliens, loin de s’effondrer, témoigne d’une vitalité remarquable. Selon les estimations 2025 de la Banque mondiale, le Burkina, le Mali et le Niger affichent respectivement des croissances de 5,4 %, 4,8 % et 6,1 %. Ces performances, obtenues dans un contexte sécuritaire difficile, traduisent la résilience et la créativité de leurs populations sous le leadership des trois chefs d’Etat qui ont fait du développement endogène, leur cheval de bataille.
La désignation du ministre burkinabè de l’Economie et des Finances, Dr Aboubakar Nacanabo, à la tête du Conseil des ministres, constitue donc une marque de confiance. Elle honore un pays engagé dans une transformation structurelle de son économie et dans la recherche d’un modèle de développement fondé sur la souveraineté et la coopération équitable. Mais ,elle impose aussi une responsabilité : celle de promouvoir une Union plus solidaire, où la diversité politique ne soit pas un motif de division.
Au moment où l’Afrique de l’Ouest cherche de nouveaux repères, l’UEMOA se devait donc de montrer l’exemple. En choisissant la cohésion plutôt que la crispation, elle ouvre la voie à un dialogue apaisé implicitement entre les blocs régionaux (CEDEAO-AES). Le Burkina Faso, à travers cette présidence, porte désormais le flambeau d’une Union réconciliée avec ses principes fondateurs : égalité, respect et complémentarité. Car, l’avenir de l’intégration ouest-africaine dépend moins des frontières politiques que de la capacité des nations à bâtir, ensemble, une prospérité souveraine et partagée.
Jean-Marie TOE