Accès des populations au soin de santé : Enseigner la médecine traditionnelle dans les universités africaines

L’épouse du Premier ministre, Dr Clémentine Dabiré (droite) a fait le déplacement de Dédougou pour encourager les TPS.

Le ministère de la Santé a célébré, les vendredi 30 et samedi 31 août 2019 à Dédougou, la 7e édition de la Semaine nationale et la 17e édition de la Journée africaine de la médecine traditionnelle. Echanges avec les Tradipraticiens de santé (TPS), remise d’attestations de formation, décoration des acteurs, cérémonie commémorative et visite de stands … ont marqué les temps forts des activités placées sous le thème : « Intégration de la médecine traditionnelle dans les programmes d’enseignement pour les étudiants en sciences de la santé dans la région africaine ».

En Afrique, 70 à 90% des populations (80% pour le Burkina Faso) ont régulièrement recours à la médecine traditionnelle et aux plantes médicinales pour le traitement des pathologies les plus courantes, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Au regard de cette place « cruciale » de la médecine traditionnelle et pour mieux renforcer sa collaboration avec la médecine moderne, la 17e édition Journée africaine de la médecine traditionnelle a été placée sous le thème : « Intégration de la médecine traditionnelle dans les programmes d’enseignement pour les étudiants en sciences de la santé dans la région africaine ».

La commémoration de cette Journée a été couplée avec celle de la 7e Semaine nationale de la médecine traditionnelle, avec pour thème :
« Agriculture des plantes médicinales au Burkina Faso, une innovation pour un développement durable de la production des médicaments issus de la médecine traditionnelle de qualité », du 26 août au 1er septembre 2019 à Dédougou, dans la Boucle du Mouhoun.

Le représentant de la Fédération nationale des tradipraticiens du Burkina Faso, El hadj Ousmane Ouédraogo, a salué les progrès enregistrés dans l’organisation des Tradiparticiens de santé (TPS), dans leurs formations, dans leur reconnaissance par la politique nationale de santé publique et dans l’homologation de leurs produits. Toutefois, a-t-il dit, beaucoup reste à faire, dans la transmission des savoirs ancestraux au regard de l’importance de la médecine traditionnelle dans les soins de santé des populations.

Il est nécessaire, a soutenu M. Ouédraogo, que l’élite africaine s’approprie cette médecine, « clé de voûte de sa pérennisation», saluant ainsi le choix du thème de la Journée africaine. Pour sa part, la représentante-résidente de l’OMS au Burkina Faso, Dr Alimata Jeanne Diarra/ Nama, dans le message de la directrice régionale pour l’Afrique de l’Organisation, a salué les progrès dans le domaine, précisant que 40 Etats africains, membres de l’OMS mettent en œuvre des politiques en la matière, avec notamment l’intégration de cette médecine dans les programmes de formation en sciences de la santé, contre huit pays enregistrés en 2000.

« Des comités d’experts nationaux et des programmes pour la médecine traditionnelle sont actifs dans 33 ministères de la Santé contre 10 en 2000. On est passé, de l’an 2000 à ce jour, de 18 à 33 instituts de recherche qui évaluent la qualité, l’innocuité et l’efficacité des médicaments traditionnels utilisés pour le traitement du paludisme, des infections … selon les lignes directrices de l’OMS. 89 autorisations de commercialisation ont été délivrées en 2018 pour les médicaments traditionnels dans le traitement des principales maladies transmissibles et non, contre 20 en 2000.

En tout, 43 produits de la médecine traditionnelle ont été ajoutés aux listes nationales des médicaments essentiels en 2018 contre 14 en 2000 », a-t-elle précisé. Dr Alimata Jeanne Diarra/Nama a donc félicité les institutions académiques qui proposent des cours de médecine traditionnelle comme au Ghana (licence en phytothérapie depuis 2001).

Les efforts du Burkina salués

 

La représentante-résidente de l’OMS au Burkina, Alimata Jeanne Diarra/Nama, a réitéré le soutien de l’OMS à la promotion de cette médecine au Burkina.

Le secrétariat de l’OMS, a-t-elle dit, reste disposé à travailler avec ses Etats membres, dans le but de renforcer l’intégration de la médecine traditionnelle dans les systèmes de santé nationaux. A cet effet, elle a donc appelé les gouvernements, institutions universitaires, instituts de recherche et aux secteurs privés à renforcer leur collaboration. Déjà, la représentante de l’OMS a félicité le Burkina Faso pour ses efforts en droite ligne avec les recommandations de l’Organisation mondiale.

Elle a cité entre autres, l’intégration de la médecine traditionnelle dans l’enseignement des Unités de formation et de recherche (UFR) des sciences de la santé à Bobo-Dioulasso et « bientôt » à Ouagadougou. A cela, s’ajoutent l’inscription des médicaments traditionnels améliorés sur la liste nationale des médicaments essentiels, l’élaboration de fiches de référence des patients entre les tradipraticiens et les médecins et enfin, la construction du Centre de médecine traditionnelle et de soins intégrés à vocation internationale à Tengandogo (Ouagadougou).

Une source « intarissable » d’innovations

Dans son message lu par le ministre de la Santé, Pr Léonie Claudine Lougué, le Premier ministre, Christophe Joseph Marie Dabiré a rappelé qu’au Burkina Faso, la médecine traditionnelle a été officiellement reconnue en 1994 dans le Code de santé publique. L’organisation de la Journée africaine, a-t-il poursuivi, vise à maintenir le dynamisme impulsé depuis les années 1970 (année de tolérance des médicaments traditionnels) dans la promotion de la valorisation de la médecine traditionnelle.

Pour concrétiser la « forte volonté » de son gouvernement dans l’intégration des deux pratiques de santé dans le système de soins, a relevé le Premier ministre, le ministère de la Santé s’est engagé dans la construction du Centre de médecine traditionnelle de Tengandogo (opérationnel en 2020), ainsi que le développement de structures d’interface au sein des Centres hospitaliers régionaux de Tenkodogo et universitaire de Ouahigouya. « En outre, le ministère développe un système de référence et de recours afin de permettre aux praticiens de la médecine traditionnelle de transférer leurs patients aux praticiens de la médecine conventionnelle et vice-versa », a relevé le chef du gouvernement.

Il est nécessaire, a-t-il poursuivi, d’introduire des notions de médecine traditionnelle dans les curricula des étudiants, convaincu que la combinaison des deux pratiques est la solution aux problèmes de santé des populations. Et pour cause, a-t-il précisé, la médecine traditionnelle constitue pour les chercheurs, une source « intarissable » d’innovations dans les domaines économique, sanitaire, environnemental …, parce qu’ouvrant « un nouveau mode d’exploration et d’interrogation, de remise en cause, d’invention et donc de création d’emplois et de développement ».

Vers un fonds d’appui

La ministre de la Santé, Claudine Lougué (droite) a encouragé les TPS qui ont exposé leurs produits lors de la Journée.

Lors de la cérémonie, sept personnes ont été faites chevalier de l’Ordre du mérite de la santé et de l’action sociale, avec agrafe Santé. Dans la soirée du vendredi 30 août, la ministre de la Santé, Claudine Lougué et ses collaborateurs ont échangé avec les TPS, au terme d’une formation, du 26 au 29 août, dans la cité de Bankuy.

Selon le porte-parole des participants à la formation, le Dr Pascal Nadembèga, les travaux ont porté sur l’état des lieux de la médecine traditionnelle au Burkina Faso, la délivrance des autorisations d’exercice, le montage de dossiers de demande d’autorisation, la collaboration avec la médecine moderne, la bonne pratique de récoltes et de séchage des plantes médicinales. Les échanges qui ont suivi ce compte-rendu ont permis aux TPS de soumettre à la ministre de la Santé, les préoccupations qui entravent leur activité.

Il s’agit de la mise en place d’un fonds d’appui à la médecine traditionnelle, la multiplication des formations aux bonnes pratiques et la nécessité d’un accompagnement du ministère en charge de l’environnement en vue de la préservation des plantes médicinales. Pour la ministre de la Santé, les démarches en vue de l’effectivité du fonds suivent leur cours et un comité sera mis en place impliquant les TPS. Elle a salué le fait que les tradipraticiens ont pris conscience de la nécessité de préserver les plantes en voie de disparition et les a encouragés à faire des bosquets dans leurs localités respectives.

Jean-Marie TOE

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