Debout dans la tempête

C’est de l’intérieur du pays que le ton a été donné. Samedi dernier à Fada, le collectif CGTB section de l’Est a organisé une marche pour demander au gouvernement « l’arrêt immédiat des prélèvements de l’IUTS sur les indemnités et les primes des travailleurs et le remboursement dans des meilleurs délais, des coupures déjà opérées»…. Ainsi donc, le débat semble subrepticement glisser de la force de la raison, vers la raison de la force, vers une nouvelle fronde sociale sur la question des prélèvements de l’IUTS sur les primes et indemnités des travailleurs du public. Une confrontation dont le pays, en proie à une menace terroriste dont l’ampleur et l’évolution sont jusque-là inédites, aurait pu bien se passer. Les appels du gouvernement au dialogue ne trouvent, pour l’instant, pas d’écho, auprès des partenaires sociaux. Cette réforme, il faut le reconnaitre, a beau avoir son fondement dans la légalité (la disposition existe depuis la loi de finances 2017), la légitimité (principe d’égalité et d’équité consacré par la Constitution), elle reste impopulaire et suscite même des appréhensions jusqu’au sein même de l’exécutif, en ce qu’elle touche au portefeuille des agents de l’Etat. L’essentiel, de notre point de vue, est moins de savoir qui remporterait la bataille en définitive, la bataille de l’opinion et partant le combat que de renouer le plus rapidement possible le fil du dialogue entre le gouvernement et les partenaires sociaux.
Pour sûr, le budget de l’Etat accuserait le coup d’un renoncement à l’application de l’IUTS (3e impôt de l’Etat en termes de performances) aux primes et indemnités des agents du public (ce qui emporterait le renoncement à l’imposition des agents du secteur privé). Ce qui n’exclut pas qu’un dialogue franc et sincère qui ne tienne compte que de l’intérêt supérieur de la Nation, permette aux travailleurs d’obtenir une réponse tout aussi claire sur la question que nombre de contribuables se posent : où vont nos impôts ? Car les considérations idéologiques mises à part, certains contribuables n’attendent que des gages de gestions exemplaires des deniers publics. Des préoccupations pertinentes (liées notamment à la rationalisation du train de vie de l’Etat) issues de la conférence nationale des forces vives de la Nation sur le système de rémunération des agents publics de l’Etat pourraient enfin trouver un cadre approprié de résolution. Ce dialogue a été le ferment de la résilience du peuple burkinabè. En guerre contre le terrorisme, bien loin de s’apitoyer sur son sort, il a su rester debout dans la tempête et même marqué de bons points dans sa ferme résolution à transformer structurellement son économie dans le cadre du Plan national de développement économique et social (PNDES). Disons-le, il serait malsain de parler de victoire pour un camp quand syndicat et autorité se crêpent les chignons.
Le Burkinabè lamda trinque à coup sûr ! Les « frappes » ont beau être « chirurgicales », « ciblées » de surcroît, elles feront du mal à tous, car la paralysie de la machine publique et privée n’épargnera personne, pas plus qu’elle n’améliorera le revenu déjà modique de nos concitoyens privilégiés par un travail salarié.
Le Burkinabè nouveau sait d’où il vient ! Le plus beau est à venir pour le Burkina Faso sur orbite, et ce n’est pas un vœu pieux. Un peu de concession et de don de soi nous le fera naître ! Gageons que l’intérêt supérieur de la Nation sera sauf dans l’arène que dressent avec véhémence les organisations syndicales.
En ce temps de carême chrétien, nous devons partager ce passage du mandement 2020 de l’archevêque métropolitain de Ouagadougou sur la responsabilité de tous dans le retour de la paix au Burkina Faso. « Nous devons quitter la logique de l’équilibre par la peur et acquérir une nouvelle conscience morale, le sens d’une éthique globale de solidarité et de coopération au service d’un avenir commun ».

Par Mahamadi TIEGNA
mahamaditiegna@yahoo.fr

Laisser un commentaire