Pour une campagne électorale soft

La campagne électorale pour les élections présidentielle et législatives couplées s’ouvre, le samedi 31 octobre 2020. Les partis et formations politiques en lice, qui nourrissent l’espoir d’une double victoire au soir du 22 novembre, iront à la pêche aux voix sur toute l’étendue du territoire national. En attendant le top de départ officiel, chaque parti affine sa stratégie et son projet d’offre politique qui ne seront dévoilés qu’au dernier moment, histoire de ne pas se laisser piquer ou ravir, a peu de frais, quelques idées fortes par les moins inspirés. La situation sécuritaire reste très préoccupante. Mais l’expression démocratique, notamment la participation citoyenne aux choix de nos représentants et de nos gouvernants doit s’opérer à temps et à contretemps. C’est l’un des principaux enseignements du maintien des échéances à leur date initiale lorsque tout semblait concourir à un report.
En plus du contexte sécuritaire, il ne faut pas oublier la situation sanitaire avec la COVID-19 qui appelle tous les hommes politiques ainsi que les autres citoyens au respect des mesures-barrières, à la distanciation physique et au port obligatoire de bavettes en vue de maîtriser la propagation du virus. Ce, d’autant plus que des experts prévoient une deuxième vague de la prolifération de la maladie avec l’harmattan qui est en train de s’installer en Afrique subsaharienne. Les comportements de relâchement sont donc à proscrire pour une campagne électorale saine.
A tout le moins, est-il nécessaire, voire impératif dans un esprit de préservation du délicat climat du vivre-ensemble, que l’ensemble de la classe politique s’accorde pour une campagne électorale soft, calme, sans aucune escalade, même verbale. A priori, le consensus qui a prévalu dans le débat sur le report ou non du présent scrutin, à la récente modification du Code électoral et la bonne tenue (jusque-là) du processus électoral nous inclinent à tabler sur une campagne électorale sans tache. Les Burkinabè n’attendent pas moins de leur classe politique que ce que les autorités de Transition ont réussi en 2015. Dans les conditions que nous savons, celles-ci avaient piloté une élection couplée incontestée dans une transparence unanimement saluée par l’ensemble des acteurs du processus à l’issue de laquelle le challenger (Zéphirin Diabré) a reconnu la victoire du vainqueur (Roch Marc Christian Kaboré) qu’il a félicité avant même la proclamation des résultats. Mais ça c’était en 2015. Le scrutin du 22 novembre se présente comme des plus ouverts. Avec d’un côté, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) au pouvoir et ses alliés, convaincus de cette avance statistique encore appelée « prime au sortant » sans être assurés du jugement que les citoyens leur réserveront de la gestion de la crise sécuritaire et de ses manifestations les plus hideuses, la désagrégation, par endroit, du tissu social . De l’autre, l’Union pour le progrès et le changement (UPC), l’ex-parti au pouvoir, le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) et d’autres formations de moindre envergure, caressent l’ambition de faire la différence dans au moins une des élections, en faisant la jonction avec ceux et celles qui n’auront pas trouvé leur compte dans la gouvernance des cinq dernières années. En droite ligne d’une campagne soft, chaque parti devrait cultiver sa différence, tenter de se poser en alternative crédible avec, en ligne de mire, la consolidation de la paix, du vivre-ensemble sans céder à la tentation d’une pêche aux voix à la dynamite. Autrement, les campagnes électorales aux allures d’immenses foires d’empoigne sans référence aux différentes plateformes programmatiques sont à bannir à jamais, car l’enjeu ne devrait pas tuer le jeu démocratique.

Par Mahamadi TIEGNA
mahamaditiegna@yahoo.fr

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