Tchad Sanglante empoignade avant l’heure

L’opposant et candidat à la présidentielle du 11 avril 2021 au Tchad, Yaya Dillo, vit des moments difficiles depuis peu. Des hommes armés ont attaqué son domicile dans la soirée du dimanche 28 février, tuant cinq personnes dont sa mère et son fils. Les auteurs de ces violences appartiennent, selon des sources locales, à une unité de la garde présidentielle dirigée par le fils du président Idriss Déby. La question qui vient à l’esprit est : Qu’est-ce que Yaya Dillo a pu bien faire pour mériter une telle foudre de la part du pouvoir ? Ancien rebelle, proche et originaire de la même tribu que le chef de l’Etat, Idriss Déby, les Zaghawas, Yaya Dillo paie certainement pour avoir osé convoiter le trône auquel tient viscéralement le clan Déby. Bien avant cet assaut au domicile de l’opposant, le quartier dans lequel habite le candidat du Parti socialiste sans frontières était quadrillé par des militaires armés sans raison objective. Craignant que Yaya Dillo ne fasse bouger les lignes en sa faveur lors de la campagne électorale, le camp présidentiel a pris de l’avance pour le réduire simplement au silence. Le moral de M. Dillo est ébranlé à quelques jours de l’ouverture de la campagne électorale. Dans quelles conditions sécuritaires pourra-t-il aller à la conquête de l’électorat si l’on n’a pas hésité à attaquer son domicile ? Comment battre une campagne électorale dans la sérénité quand vos proches ont été lâchement assassinés ? Autant de questions qui vont préoccuper le candidat. En clair, Yaya Dillo fera de la figuration lors de la campagne puisque sa vie même est en danger. Si c’est une stratégie pour limiter les chances d’un challenger, le camp du président tchadien a fait la pire des options. L’on ne peut pas comprendre que dans un pays qui se dit démocratique, de tels agissements moyenâgeux puissent avoir pignon sur rue. Tout le monde connaît l’issue de l’élection présidentielle du 11 avril prochain. Idriss Déby sera réélu sans surprise pour son sixième mandat. De ce fait, il n’a pas besoin de s’en prendre à ses opposants de cette manière rétrograde. En tous les cas, c’est l’image du Tchad et de sa démocratie qui se trouve ternie par ces actes barbares et insensés. Ce qui arrive à Yaya Dillo est quelque part un message envoyé aux 15 autres challengers en lice pour la présidentielle : gare à celui qui voudra montrer qu’il pourrait inquiéter le président-candidat Idriss Déby ! Les adversaires du président sortant devront savoir se tenir durant cette période électorale au risque d’essuyer sa colère. Au nom de la démocratie et de la boulimie du pouvoir, les droits des citoyens sont littéralement piétinés. Triste et révoltant que l’avenir d’un pays soit pris en otage par un chef et son clan qui dictent leur loi. Quand le Tchad va-t-il renouer avec l’état de droit où le citoyen sera respecté et protégé ? Il faudra attendre encore.

Karim BADOLO

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