Chronique du carême : le Carême … un temps privilégié de conversion !

Dès l’entame du carême, depuis le 14 février dernier, le ton qui lui est donné en fait un temps de conversion et de préparation spirituelle. Comme chaque année, l’Eglise nous invite à nous mettre en marche pour préparer notre cœur à accueillir pleinement la grâce du Mystère Pascal, commémoré pendant la Semaine Sainte. Et dans cette perspective elle propose à ses fidèles d’accentuer l’accomplissement de « bonnes œuvres » : la charité (par l’aumône), la pénitence (le jeûne), et la prière.

Mas en réalité, ces œuvres ne seront bonnes que si elles sont faites avec générosité. Le Père veut un culte « en esprit et en vérité ». Dieu bénit les œuvres qui sont le fruit d’un véritable esprit chrétien et d’un cœur sincère. Les « bonnes œuvres » faites pour paraître vertueux aux yeux des autres ne plaisent pas à Dieu. Il ne bénit pas les œuvres faites par hypocrisie ou par vanité. Seules les œuvres accomplies par amour de Dieu et pour sa gloire lui plaisent. L’évangile de saint Mathieu (6, 1-6 ; 16-18) précise bien le sens mais surtout la manière d’utiliser les moyens que l’Eglise met à notre disposition pour nous aider dans notre démarche de conversion.

Si le Carême est un temps de conversion profonde, c’est l’occasion d’un changement de cœur. Le chrétien est appelé à se renouveler intérieurement en rejetant le mensonge, l’hypocrisie, et la vanité. Le chrétien ne se contente pas de connaitre la vérité ; il s’efforce de vivre en accord avec sa condition de disciple de Jésus. Il fait appel à sa volonté pour agir mais il le fait par amour. En cela, l’authenticité chrétienne de toute œuvre consiste dans l’esprit de charité qui l’anime. Saint Paul s’en fait le chantre de fort belle manière dans sa lettre aux Corinthiens : 1 Co 12, 31- 13,13. La primauté de l’amour sur les autres charismes est tel qu’il soutient : ‘‘ On pourrait donner toutes ses possessions pour nourrir les pauvres, et livrer son corps pour être brûlé, si l’on n’avait pas l’amour, cela servirait à rien.’’ (13,2-3). Comme nous le dit le saint pape Jean Paul II, « l’amour chrétien n’est pas un simple acte de charité, mais aussi une rencontre avec le Christ », une rencontre personnelle qui transforme tout notre être.

Un tel amour est bien loin d’être un sentiment. C’est un don où le croyant découvre l’action de Dieu en lui. Depuis quelques temps circule de façon abondante sur les réseaux sociaux ce texte attribué au pape François et qui dit ceci : « Mangez ce que vous voulez pendant la Semaine Sainte, le sacrifice n’est pas dans l’estomac mais dans le cœur. Les gens s’abstiennent de manger de la viande, mais ils ne parlent pas à leurs frères et sœurs et/ou à leurs proches, ils ne rendent pas visite à leurs parents et ne s’occupent pas de leurs enfants. Ils ne partagent pas leur nourriture avec ceux qui en ont le plus besoin, ils éloignent leurs enfants de leur père/mère et/ou de leurs grands-parents, ils critiquent la vie des autres, maltraitent leur partenaire, etc. La viande ne fait pas de vous une mauvaise personne, tout comme un filet de poisson ne fera pas de vous un saint. Mieux vaut chercher à avoir une bonne relation avec Dieu en faisant du bien aux autres. Soyons moins arrogants et plus humbles de cœur ».

Il ne faut pas s’y tromper. Ce n’est pas pour changer les dispositions classiques du carême que le pape dirait cela ! Il appelle à vivre en esprit et en vérité ce temps de conversion, de telle sorte que nos actes et tous nos efforts fournis nous ouvrent davantage à Dieu et aux autres. Ainsi, « jeûner, c’est apprendre à changer d’attitude à l’égard des autres et des créatures », tandis que la prière, permet «de savoir renoncer à l’idolâtrie et à l’autosuffisance de notre moi, et reconnaître qu’on a besoin du Seigneur et de sa miséricorde ». Quant à l’aumône c’est, selon le pape, un moyen de « se libérer de la sottise de vivre en accumulant toute chose pour soi dans l’illusion de s’assurer un avenir qui ne nous appartient pas ». Partant, il est bien clair que le carême n’est pas à réduire à un temps de jeûne ou de quelque privation. C’est bien plus un temps privilégié qui nous est donné pour redécouvrir notre foi et cette puissance d’amour qui y est enfouie. Alors, qu’allons-nous faire comme Carême pour justement libérer en nous cette puissance de vie, d’amour qui nous élève au niveau de Celui qui a tout donné, jusqu’à sa vie pour que vive l’Homme ? Chacun devrait se poser la question, avec en ligne de mire que le temps du Carême est un temps pour se convertir ; c’est le temps de changer réellement quelque chose pour me rapprocher de moi-même, mais aussi des autres autour de moi, et surtout du Seigneur ! Si nous voulons que la fête de Pâques ait un sens, il faut donner un sens au Carême : En acceptant de s’exposer un tant soit peu à la lumière du Seigneur, on trouve toujours une part sombre ou d’ombre de soi qui a besoin d’en être éclairée pour que notre vie soit plus nette. Et ce n’est jamais un acquis une fois pour toutes, notre conversion …

Abbé Paul DAH

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