Hamadou Ouédraogo, chef de service de la coordination de la Police de l’environnement: « Nous avons déjà mené plus de 300 opérations sur l’ensemble du territoire »

Hamadou Ouédraogo, inspecteur de l’environnement et chef de service de la coordination de la Police de l’environnement à la Direction générale de la préservation de l’environnement.

Créée le 24 juillet 2024 par le ministère de l’Environnement, de l’Eau et de l’Assainissement, la Police de l’environnement se veut un outil opérationnel au service de la préservation des ressources naturelles et de la lutte contre les atteintes à l’environnement. Dans cette interview, Hamadou Ouédraogo, inspecteur de l’environnement et chef de service de la coordination de la Police de l’environnement à la Direction générale de la préservation de l’environnement, revient sur les motivations ayant conduit à la mise en place de cette force, ses missions, les actions menées sur le terrain, ainsi que les défis auxquels elle est confrontée.

Sidwaya (S) : Quelle a été la motivation principale derrière la création de la Police de l’environnement par le ministère de l’Environnement, de l’Eau et de l’Assainissement ?

Hamadou Ouédraogo (H.O) : Face à la dégradation continue de notre environnement, le législateur a entrepris une règlementation spécifique du domaine de la gestion environnementale. Ce qui s’est traduit par l’adoption du premier Code de l’environnement en janvier 1994. Ce Code a été révisé en 1997, puis en 2013 (version en vigueur). Malgré un cadre juridique important, le ministère en charge de l’environnement est interpellé chaque jour face à des problèmes de pollutions et de nuisances de tout genre.

Cette situation nous amène à nous poser des questions quant à l’application effective de ces textes juridiques, dont le rôle premier est de prévenir toute forme d’atteinte à l’environnement. Face à ces constats, les états généraux du ministère, tenus en juillet 2019, avaient relevé qu’il fallait travailler à opérationnaliser la Police de l’environnement. Pour donner suite aux recommandations des états généraux, des comités de réflexion ont été mis en place, dont un chargé de réfléchir sur l’opérationnalisation de la Police de l’environnement.

S : Comment la création de cette structure s’inscrit-elle dans la stratégie globale du Burkina Faso en matière de protection de l’environnement ?

H.O : La Police de l’environnement au Burkina Faso s’inscrit dans la stratégie globale de la préservation de l’environnement en assurant le respect des lois et règlements relatifs à la

Des stocks de sachets plastiques saisis par la Police de l’environnement.

préservation de l’environnement. Elle joue un rôle clé dans la mise en œuvre des politiques environnementales du pays. A cet effet, elle mène des actions de prévention, de surveillance, de contrôle et de répression en lien avec la lutte contre les pollutions et nuisances diverses, le péril
plastique, la mauvaise gestion des produits chimiques et déchets et la dégradation des espaces paysagers urbains.

S : Quelle est la mission principale assignée à la Police de l’environnement et quels sont ses objectifs à court et moyen termes ?

H.O : La Police de l’environnement vise à prévenir, surveiller,
contrôler et réprimer toute forme d’atteinte à l’environnement, dans l’optique de protéger les êtres vivants contre les atteintes nuisibles ou incommodantes et les risques qui gênent ou qui mettent en péril leur existence du fait de la dégradation de leur environnement et à améliorer leurs conditions de vie. Sa fonction est donc de garantir le respect de la réglementation environnementale et de promouvoir le civisme écologique. A ce titre, la Police de l’environnement a pour mission entre autres, de veiller au respect de la règlementation environnementale ; d’informer et sensibiliser le public à la
réglementation ; de conduire des missions de contrôle ; de contrôler les actes et procédures en matière environnementale ; de participer à l’organisation de certaines
missions de Police communale avec les autres services ; de chercher et constater les
infractions environnementales; d’appliquer des amendes et autres sanctions administratives; de traiter les plaintes d’atteinte à l’environnement; d’assurer un suivi et une surveillance continue de la qualité de l’environnement et de lutter contre la dégradation des espaces paysagers urbains.

S : Quels sont les domaines d’intervention prioritaires de la Police de l’environnement au regard des défis environnementaux actuels du Burkina Faso ?

H.O : En ce qui concerne les domaines prioritaires de la Police de l’environnement, il s’agit des pollutions et nuisances, la mauvaise gestion des déchets dans nos villes, le brulage des pneus dans la périphérie de la ville de Ouagadougou, la gestion des
produits chimiques et déchets ; l’explosion de magasin clandestin de produits chimiques dans la ville de Dori et la mauvaise gestion des huiles de vidange usées. A ceux-ci, il faut ajouter le péril plastique par l’application de la loi N°045-2024/ALT du 30 décembre 2024 portant sur les emballages et sachets en plastique au Burkina Faso.

Les actions de la Police environnementale sont basées sur des fondements juridiques à savoir : la Loi n°006-2013/AN du 02 avril 2013 portant Code de l’environnement au Burkina Faso ; le Décret n°2021-0287/PRES/PM/MINEFID/MFPTPS du 22 avril 2021 portant statut particulier du métier eau, agriculture et environnement, quant à lui confère des missions de Police environnementale à la famille d’emploi de gestion de l’environnement et le Décret N° 2024-0338/PRESTRANS/PM/MEEA/MATDS/MEFP/MJDHRI du 28 mars 2024 portant organisation et conduite des opérations de la Police de l’environnement.

S : Comment la Police de l’environnement est-elle structurée sur le plan hiérarchique et opérationnel ?

Les responsables de la mauvaise gestion des huiles de vidange usées…

H.O : La Police de l’environnement a deux fonctions. Il y a la fonction administrative spéciale qui est sous l’autorité du ministre de l’Environnement, de l’Eau et de l’Assainissement. L’autre fonction est celle judiciaire qui est sous l’autorité du procureur du Faso près le Tribunal de grande instance (TGI) de son ressort
territorial. En ce qui concerne la structuration hiérarchique et opérationnelle de la Police de
l’environnement, toute opération de cette structure relève de l’initiative d’une autorité compétente qui agit dans les limites de son ressort territorial. Au niveau central, la Direction générale de la préservation de l’environnement (DGPE) à travers la coordination de la Police de l’environnement exerce une compétence territoriale nationale.

Elle coordonne l’ensemble des Polices de l’environnement. Ce niveau définit les politiques, les réglementations et les orientations stratégiques. En dehors du niveau central, la Police de l’environnement est déconcentrée à travers les services départementaux, provinciaux et régionaux de la Police de l’eau et de l’environnement. Ces services mettent
en œuvre les directives au niveau terrain. Chaque niveau hiérarchique est dirigé par un responsable (chef de service) qui encadre les agents terrain. Ces derniers sont chargés de la surveillance, des enquêtes, des contrôles et des interventions. Sur le plan
opérationnel, la Police de l’environnement est organisée en 19 unités spécialisées, selon les domaines d’intervention. Actuellement, quatre de ces Polices environnementales sont opérationnelles. Il s’agit de : la Police de l’eau ; les inspections environnementales, les inspections radiologiques et électromagnétiques et la Police de l’hygiène publique. La Police environnementale travaille en collaboration avec d’autres institutions et services comme les Eaux et Forêts, le Fonds d’intervention pour l’environnement et les laboratoires publics et privés.

S : La Police de l’environnement existe depuis le 24 juillet 2024. Jusqu’à ce jour, quelles sont les actions qu’elle a pu mener sur le terrain ?

H.O : Depuis le 24 juillet 2024 jusqu’à aujourd’hui, la Police de l’environnement a mené plus de 300 opérations de police sur l’ensemble du territoire national. Ces opérations sont composées de polices environnementales programmées et inopinées. Les principales cibles

… et des déchets dans nos villes seront réprimés par la Police de l’environnement
conformément aux textes en vigueur.

sont : le suivi des décharges éliminées ; les contrôles de la gestion des déchets solides et liquides ; le contrôle de la gestion des produits chimiques ; le contrôle des normes de rejets dans les unités industrielles ; l’opération zéro brulage de pneus dans la ville de Ouagadougou et le contrôle des emballages et sachets en plastique interdits par la loi N°045-2024/ALT du 30 décembre 2024 portant sur les emballages et sachets en plastique au Burkina Faso.

S : Quel type de collaboration la Police environnementale entretient avec les autres corps de sécurité (Police municipale, nationale, gendarmerie et douane) ?

H.O : Nous avons d’excellentes relations de collaboration avec l’ensemble des autres corps de sécurité sur le territoire national. Elle se manifeste par deux façons : la collaboration directe par les échanges d’informations sûres d’atteinte à l’environnement ou de droits communs et la collaboration sur instruction du procureur du Faso territorial compétent sur des besoins spécifiques.

S : Quels sont les principaux défis auxquels votre structure est confrontée depuis sa création ?

H.O : Les principaux défis sont liés à l’insuffisance des moyens logistique et financière pour le niveau central et déconcentré où il faut prendre en compte les ressources humaines et les formations sur des thématiques spécifiques.

S : Quel message souhaiteriez-vous adresser à la population burkinabè concernant le rôle de la Police de l’environnement ?

H.O : Je voudrais inviter l’ensemble des Burkinabè à une collaboration active avec les services de Police de l’environnement pour dénoncer les actes nuisibles à notre cadre de vie. L’environnement est un bien à tous que nous devons préserver.

Paténéma Oumar OUEDRAOGO

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.