Les « fake news », l’autre combat

Le jeudi 21 avril dernier, le ministre porte-parole du gouvernement, Lionel Bilgo, a dû intervenir dans un communiqué pour démentir de fausses informations (fake news) faisant état de l’arrestation d’un membre du gouvernement alors qu’il n’en était rien. Presque au même moment, de fausses informations relatives à une pénurie de carburant ont provoqué une ruée des populations vers les stations-service et de longues files pour obtenir le précieux jus. La situation a obligé la société nationale des hydrocarbures à improviser une visite de ses soutes en vue de permettre à l’opinion « de voir pour croire que les stocks sont disponibles ».

Quelques jours avant, les images du retour d’un convoi de ravitaillement de la ville de Djibo qui ont été « détournées » et sont devenues virales sur les réseaux sociaux tentant de faire croire à un afflux massif de déplacés vers la capitale Ouagadougou. Ce qui a de nouveau obligé les autorités à rétablir les faits. Il y a quelques semaines, c’est le Président Damiba lui-même qui est monté au créneau, à la suite de bruits persistants sur une probable libération de prisonniers de la Maison d’arrêt et de correction des armées (MACA), pour rappeler à l’ordre ceux qui entretiennent la psychose par des fausses nouvelles aux dommageables conséquences. A croire que le pays vit au rythme de la désinformation qui mène la vie dure aux médias classiques dont la voix frappée du sceau de la crédibilité semble de plus en plus noyée dans « la jungle numérique ».

Les fake news ont le vent en poupe sous nos cieux avec un potentiel destructeur insondable. La survenue de la pandémie de la COVID-19 a donné lieu à une avalanche d’informations d’origines douteuses aussi invraisemblables les unes que les autres sur la vaccination notamment. A l’épidémie s’est greffée une infodemie (contraction d’information et d’épidémie) avec pour signes particuliers, des influenceurs locaux et avec pour cible, la situation sécuritaire et sanitaire nationale ainsi que les principaux animateurs de la vie publique.

Dans le contexte actuel, les fausses informations sont devenues des armes redoutables contre la cohésion sociale, contre les efforts exceptionnels déployés par les Forces de défense et de sécurité (FDS) et les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) pour combattre le terrorisme, sans pour autant qu’on arrive à identifier avec certitudes des curieux individus armés non identifiés d’un autre genre qui sont aux manettes. Si ailleurs les fake news constituent un enjeu de démocratie véritable, au Burkina Faso, ils emportent un impératif de sécurité nationale au regard des conséquences vécues ces dernières semaines. C’est certainement pour cette raison que le pays a revu dans le nouveau Code pénal adopté en 2018 et renforcé en 2019, une disposition relative aux fausses informations diffusées à travers les réseaux sociaux qui avait suscité des inquiétudes au sein des organisations socioprofessionnelles des médias.

Il n’y a donc pas lieu d’attendre les prochaines éruptions de fake news pour prendre les mesures qui s’imposent. Sans attenter à la liberté d’expression, il faut tout simplement appliquer la loi dont on peut tout reprocher sauf de ne pas être dissuasive (la peine privative de liberté peut aller jusqu’à cinq ans) face aux colporteurs de fausses informations de tout bord à travers les réseaux sociaux. Cela, en lien possible avec le Conseil supérieur de la communication qui pourrait voir ses pouvoirs de régulation étendus aux réseaux sociaux.

Par Mahamadi TIEGNA mahamaditiegna@yahoo.fr

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