Mali : Explorer la voie algérienne

Les lourdes sanctions infligées par la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) au Mali, lors de son sommet extraordinaire tenu, le 9 janvier 2022, à Accra au Ghana, continuent de faire des vagues. De l’approbation par certains à la condamnation par d’autres, chacun y va de son analyse. Parmi les pays qui se sont exprimés sur la situation malienne, figure l’Algérie, pays voisin et présidente du Comité de suivi de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali. Tout en exprimant leur solidarité au peuple malien, les autorités algériennes plaident pour une désescalade de la tension entre la CEDEAO et le Mali. C’est pourquoi, elle souhaite que la durée de la Transition soit « raisonnable et justifiable (sur) une période ferme de 12 à 16 mois ». Pour le chef de l’Etat algérien, Abdelmadjid Tebboune, une approche inclusive de la crise malienne permettrait de trouver des solutions consensuelles.

En clair, Alger milite en faveur du maintien du dialogue entre la CEDEAO et le Mali. Les sanctions, même si elles sont perçues comme des pressions sur la junte, ne sauraient encourager le retour à l’ordre constitutionnel dans un bref délai. Les deux parties sont donc appelées à se retrouver autour de la table de négociations pour appréhender en toute sérénité les points de discorde. La crise sécuritaire multidimen-sionnelle que traverse le Mali mérite d’être prise en compte dans l’appréciation de la situation actuelle. En se claquemurant derrière des sanctions qui n’apporteront rien que la désolation, c’est le Mali que l’on enfonce davantage. L’instance régionale, au nom du principe de solidarité qui fonde son existence, ne devrait pas tourner le dos à un de ses membres qui s’est enlisé dans un bourbier. Le chef de la junte, le colonel, Assimi Goïta, dans une adresse à la nation, a montré sa disponibilité à dialoguer avec la CEDEAO afin de trouver le juste compromis qui favoriserait le retour à l’ordre constitutionnel dans une échéance convenue. Quoi qu’on dise, les sanctions qui frappent actuellement le Mali touchent plus les populations que les autorités. C’est pourquoi l’approche inclusive proposée par Alger parait une alternative crédible à même de sauver les meubles. La passe d’armes stérile n’apportera rien d’autre que de sempiternelles incompréhensions qui ne feront qu’enfoncer le Mali dans la fange de l’instabilité. Certes, les principes démocratiques doivent être défendus pour permettre le renforcement de l’Etat de droit sous nos tropiques, mais il est des situations où il sied d’aller avec tact. Ce que vit le Mali aujourd’hui est quelque part lié à cette incurie de la classe politique qui n’a jamais su défendre objectivement les idéaux démocratiques.

Empêtrés dans des calculs partisans et aveuglés par des intérêts bassement égoïstes, les leaders politiques maliens se sont accommodés de pratiques moyenâgeuses qui ont compromis son processus démocratique. Quand le clientélisme, le laxisme et l’incurie font bon ménage sur la scène publique, il va de soi que les institutions et les leaders politiques perdent en crédibilité. La situation que vit le Mali invite à la culture de l’exigence démocratique dans nos pays. Tant que la scène publique sera animée sans un minimum de sérieux et d’engagement patriotique, le processus démocratique pourrait à tout moment être interrompu par des hommes en treillis. L’enracinement démocratique requiert que la classe politique fasse preuve de probité et d’exigences envers elle-même. Les vœux pieux et les discours enflammés ne feront jamais le poids quand l’exemple n’y sera pas adjoint.

Karim BADOLO

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