SNC 2023 : « On n’a pas de grands motifs d’inquiétude quant à la réussite de l’évènement », Jean Emmanuel Ouédraogo, ministre en charge de la culture

La 20e édition de la Semaine nationale de la culture (SNC) se tient à Bobo-Dioulasso sous le thème : « Diversité culturelle, ferment de l’unité nationale ». Dans cette interview réalisée, le jeudi 27 avril 2023, à 48h de l’évènement, le ministre de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme, Rimtalba Jean Emmanuel Ouédrarogo, revient notamment sur les enjeux de cette biennale plusieurs fois reportée, son organisation, les innovations et l’épineuse question de l’hébergement des artistes.

Sidwaya (S.) : Reportée à plusieurs reprises pour des raisons sécuritaire et sanitaire, la 20e édition de la SNC aura finalement lieu du 29 avril au 6 mai 2023. Le ministre que vous êtes, peut-il rassurer d’une bonne tenue de cette biennale de la culture malgré le contexte sécuritaire difficile ?

Rimtalba Jean Emanuel Ouédraogo (R.J.E.O.) : Cette 20e édition de la SNC va s’ouvrir dans quelques jours, mais c’est depuis de longues semaines que le comité national d’organisation est à pied d’œuvre. Depuis ces longues semaines, toutes les commissions ont travaillé d’arrachepied pour réunir toutes les conditions d’une bonne tenue de la SNC Bobo 2023. A ce jour, on n’a pas de grands motifs d’inquiétude. A tous les niveaux, les dispositions ont été prises dans ce sens.

S : Sous quel signe est placée cette édition ?

R.J.E.O. : Le thème : « Diversité culturelle, ferment de l’unité nationale », traduit bien le signe sous lequel nous avons placé cette SNC qui est d’autant plus importante que le pays traverse un contexte national difficile marqué par l’insécurité avec son corollaire d’attaques barbares des groupes armés terroristes. C’est une édition que les premières autorités ont autorisée pour montrer notre capacité de résilience. C’est surtout pour l’importance que nous accordons à la culture parce que la guerre contre le terrorisme, la guerre pour la paix est aussi un combat de notre culture. Les autorités de la Transition ont voulu aussi par-là, montrer la place prépondérante de nos cultures et de nos valeurs mais aussi, la capacité pour nous de nous en sortir en nous appuyant sur notre essor culturel. C’est pour cela que malgré ce contexte difficile sur le plan sécuritaire et même économique, les autorités de la Transition ont tenu à ce que cette année soit la bonne pour cette 20e édition de la SNC reportée à plusieurs reprises.

S : Quel message avez-vous à l’endroit des populations et des festivaliers ?

R.J.E.O. : Le message à tous les festivaliers, à tous les artistes, mais aussi à toute la population des Hauts-Bassins et de Bobo-Dioulasso, c’est de s’approprier cette SNC. Cette SNC ne sera une réussite que si les populations, les festivaliers et les artistes s’approprient l’édition parce que c’est la leur. Le gouvernement n’a fait que décider de l’organiser, mettre les moyens à la disposition du comité d’organisation, mais ceux qui vont faire la SNC, ce sont les artistes, ce sont les festivaliers, ce sont les populations. Nous allons demander que Bobo-Dioulasso fasse une fois de plus étalage de son hospitalité afin de réserver un accueil chaleureux à tous ceux qui viennent dans cette belle ville de Sya. J’appelle enfin tous les festivaliers, les artistes et les populations au respect des consignes sécuritaire et sanitaire. Cette édition se tient dans un contexte sécuritaire difficile. La commission chargée des questions de la sécurité a édicté des consignes. Donc, on va demander la compréhension de tous ceux qui seront là pour la SNC au respect strict de ces consignes. J’invite aussi à la collaboration parce que la sécurité n’est pas seulement l’affaire des seules Forces de défense et de sécurité. Que tout citoyen, tout festivalier qui va remarquer quelque chose de suspect, puisse donner l’information, approcher les services de sécurité qui sauront comment la prendre en charge.

S : Quelles sont les innovations de la SNC Bobo 2023 ?

R.J.E.O. : Il y a effectivement des innovations. Ce sont entre autres la participation des Trésors humains vivants (THV). Ces personnes qui sont détentrices de savoirs et de savoir-faire authentiques de notre culture. Elles ont été identifiées en tant que tel comme des Trésors humains vivants et elles sont invitées à avoir des échanges directs avec les plus jeunes, les élèves afin de partager des valeurs à cette nouvelle génération. En plus de cette forte participation des THV, il y a la mise en tourisme qui est l’une des innovations de la 20e SNC. Nous avons estimé que les plus de 600 000 festivaliers attendus peuvent de façon utile, visiter toutes les attractions de la ville de Bobo-Dioulasso. Sur le plan technologique, il y a la possibilité d’acheter les tickets par Mobile Money à travers les réseaux téléphoniques pour désengorger et éviter les longues files d’attente devant les guichets de vente.

S : Annoncée depuis des lustres, la cité des Artistes peine à être une réalité. A quand cette cité pour résoudre définitivement la question d’hébergement des artistes qui se pose à chaque édition ?

R.J.E.O. : Effectivement, la cité des Artistes est vraiment le grand projet auquel tient le ministère en charge de la culture et cela, depuis de longues années. Un gros travail a été abattu en terme de recherche du terrain et des plans architecturaux. Mais jusqu’à présent, cette cité reste toujours au stade de projet. Cette année, nous avons essayé de faire en sorte que ce projet puisse avancer parce qu’il y a déjà un terrain acquis pour abriter cette cité. Le terrain était plus grand, mais, il a été grignoté et aujourd’hui, il reste environ 4 hectares. Nous avons pris la décision de mobiliser les ressources pour cette cité des Artistes. Le lancement de sa construction sera fait en marge de cette SNC et nous allons nous donner les moyens de donner corps à ce projet. Nous avons également des partenaires, notamment le parrain culturel, qui nous ont fait la promesse pour la réalisation de cette cité. En tous cas, nous allons mettre le maximum d’énergie et d’effort pour faire aboutir ce projet auquel tient le ministère de la Culture et la communauté de la culture de façon générale. Parce que cette cité viendra résoudre beaucoup d’équations comme l’hébergement et sera fonctionnelle pour offrir d’autres services, indépendamment et permanemment afin de générer des revenus au profit de la SNC.

S : A défaut de la cité, les dispositions sont-elles prises pour assurer un hébergement décent de ces ambassadeurs de la culture ?

R.J.E.O. : Pour cette année, la commission hébergement a abattu un grand travail parce qu’on a voulu tourner le dos à l’option d’héberger les artistes dans les écoles qui a fait l’objet de nombreuses critiques légitimes. Cette année, la plupart des artistes seront logés sur des sites aménagés à cet effet pour améliorer un tant soit peu leurs conditions d’hébergement. Mais, nous restons convaincus que la solution idéale serait l’aboutissement de cette cité des Artistes.

S : Le Mali était le pays d’invité d’honneur du FESPACO. La République de Guinée est le pays invité d’honneur de la SNC. Ces choix ont-ils un lien avec nos situations socio-politiques quasi similaires ?

R.J.E.O. : Non. Ces choix ont surtout un lien avec les liens de fraternité et de coopération historique qui ont toujours existé entre nos pays. Les liens entre le Mali et le Burkina Faso sont connus. Ce sont deux pays qui ont toujours entretenu des relations fraternelles et surtout deux peuples très proches. Ceci explique donc cela. Il en est de même pour la République de Guinée. Le Burkina Faso a été l’invité d’honneur du Salon international de la culture, du tourisme et de l’artisanat (SICTA) en mai 2022. C’est depuis ce moment que la SNC avait fait le choix de la République de Guinée comme invité d’honneur. Mais malheureusement, les reports ont fait que la SNC se tient maintenant. Nous avons donc confirmé le choix de ce pays et nous sommes heureux que la République de Guinée l’a accepté et a manifesté toute sa disponibilité et son enthousiasme à venir à cette fête de la culture dans un pays frère comme le Burkina Faso. Il est clair que les trois pays traversent les mêmes situations politiques de transition assez similaires. Il convient également qu’on puisse conjuguer nos efforts pour que ces transitions marquent durablement l’histoire de ces pays en insufflant une nouvelle dynamique de développement. S : Il y a quelques temps, la SNC a fusionné avec la maison de la Culture de Bobo-Dioulasso. A quoi répond cette fusion ? R.J.E.O. : Cette fusion a été actée maintenant, mais les réflexions qui avaient été menées auparavant, concernant la maison de la Culture de Bobo-Dioulasso et la SNC avaient préconisé cette option pour des soucis d’efficacité et de rationalité. Ces deux entités qui sont comme deux faces d’une même pièce étaient indépendantes l’une de l’autre. Nous avons donc jugé utile qu’elles fassent désormais une seule structure, avec une seule direction générale sous la dénomination de Semaine nationale de la culture. C’est donc pour des soucis d’efficacité, pour avoir une structure plus robuste, plus harmonieuse et plus cohérente parce que la SNC se passe pour l’essentiel à la maison de la Culture de Bobo-Dioulasso.

S : De plus en plus, une certaine opinion pense que la SNC doit s’organiser de façon tournante. Est-ce une option dans l’avenir ?

R.J.E.O. : Pour le moment, ce n’est vraiment pas une option. Peut-être que la réflexion viendra plus tard, mais le choix de fixer la SNC à Bobo-Dioulasso uniquement a été opéré depuis 1990. Jusque-là, les choses se passent très bien. Toutes les communautés sont heureuses de se retrouver à Bobo-Dioulasso pour communier autour de leur culture.

S : Quelles sont vos attentes de cette SNC ?

R.J.E.O. : Je souhaite une bonne fête de la culture à l’ensemble des Burkinabè, à toutes les communautés et que cette SNC puisse montrer une fois de plus, les capacités organisationnelles de notre pays et permettre à nos communautés de se retrouver autour des valeurs chères de paix, de bonne entente et de fraternité. Que cette SNC qui est une édition de résilience puisse également redonner espoir à l’ensemble des Burkinabè. Et enfin, qu’elle puisse montrer à la face du reste du monde que le Burkina Faso reste debout, confiant en son avenir et qui a foi que sur la base de sa culture, elle va s’en sortir.

Interview réalisée par Kamélé FAYAMA

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