Le Cameroun, pays d’Afrique centrale, va-t-il connaitre une alternance historique, au sortir de la présidentielle du 12 octobre 2025 dernier ? Issa Tchiroma, l’opposant de 76 ans et principal adversaire à Paul Biya, croit dur comme fer à ce changement et pense pouvoir même l’incarner dans les prochains jours. L’une des formations politiques acquises à la cause de l’ancien ministre de la Communication, l’Union pour le changement (UPC), a revendiqué la victoire pour lui, dès le premier tour, avec 60 et 80% des voix, en se fondant sur les premières tendances issues des urnes.
Apparaissant comme le plus sérieux des 11 prétendants à la magistrature suprême face au président sortant, qui règne en maitre absolu sur le pays depuis 43 ans, l’ancien ministre de la Communication se positionne déjà comme le successeur de Biya. Si on ne peut pas nier son côté ambitieux et audacieux, Tchiroma, ou du moins ses inconditionnels, a quelque peu pêché en devançant l’organe chargé des élections, ELECAM, pour annoncer les résultats. A Garoua, son fief dans le Nord du Cameroun, où il a soulevé des foules et suscité de l’enthousiasme lors de sa campagne, des échauffourées ont éclaté entre ses partisans et les forces de l’ordre. La proclamation avant l’heure des résultats par Tchiroma, alors qu’ils sont attendus jusqu’au 26 octobre prochain, fait monter la température sociopolitique et expose le pays à des tensions postélectorales.
Des mouvements inhabituels de troupe sont d’ailleurs constatés dans la capitale, nourrissant des rumeurs d’un coup d’Etat en gestation. Biya va-t-il subir le même sort que son voisin, l’ex-Président Ali Bongo, aujourd’hui en exil ? La plupart des opposants souhaite voir un vent nouveau souffler sur le Cameroun. Les dépouillements se poursuivent et il a tout l’air, que le chef de l’Etat sortant, 92 ans, demeure le grand favori. Le 8e mandat est à portée de main de Biya, à moins que ses compatriotes n’aient décidé autrement, ce que le verdict des urnes viendrait à confirmer ou infirmer.
Pour l’heure, une sorte de bras de fer s’installe entre Tchiroma et le chef de l’Etat sortant. Un vainqueur devra forcement en sortir, mais il est souhaitable que cela soit conforme à la volonté des Camerounais, qui ont voté en toute conviction, qu’à une épreuve de force. La convoitise du pouvoir mène à tout, mais il faut savoir raison gardée, pour ne pas faire basculer le Cameroun dans un climat d’incertitude. Jusqu’à preuve du contraire, il faut faire confiance à ELECAM, du haut de son expérience dans l’organisation des élections, même si le régime Biya a mis le pays sous coupe réglée.
Le dernier mot revient aux Camerounais et à personne d’autre. Veulent-ils continuer avec un Biya, croulant sous le poids de l’âge malgré les actions de communication visant à glorifier son image et n’ayant plus rien à prouver ou ouvrir la voie à une nouvelle ère au sommet de l’Etat ? On n’attend plus, que les résultats du scrutin du dimanche pour le savoir. Les heures à venir nous instruiront…
Kader Patrick KARANTAO