FESPACO 2019: Le graal à Joël Karekezi

Le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré (gauche) et son homologue rwandais, Paul Kagamé ont remis à Joël Karekezi, le trophée de l’Etalon d’or de Yennenga.

Les lampions se sont éteints sur la 26e édition du FESPACO, le samedi 2 mars 2019, avec le sacre de «The Mercy of the jungle» ou «La miséricorde de la jungle» du Rwandais Joël Karekezi comme Etalon d’or de Yennenga. La cérémonie a connu la présence du président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré et de ses homologues malien, Ibrahim Boubacar Kéita et rwandais, Paul Kagamé.

‘’The Mercy of the jungle’’ ou ‘’La miséricorde de la jungle’’ de Joël Karekezi a remporté l’Etalon d’or de Yennenga à la 26e édition du FESPACO. Il succède ainsi à Alain Gomis, qui a remporté le plus prestigieux trophée du cinéma africain à la précédente édition. En plus du trophée, le lauréat a reçu 20 000 000 de francs CFA. Très ému, le lauréat, 33 ans, a dédié son trophée à la jeune génération.

Car, pour lui, la plus grande distinction du cinéma africain vient prouver que les jeunes sont capables de réaliser de bons films qui racontent de très belles histoires. «The Mercy of the jungle» est un film qui parle de la vie et de la paix. «Nous l’avons tourné dans des conditions assez difficiles dans la jungle. Mais, je crois que ce trophée est une satisfaction entière de toute l’équipe de tournage», a déclaré Joël Karekezi, dont le film a également remporté la meilleure interprétation masculine avec son acteur principal, Marc Zinga.

L’Étalon d’argent (10 000 000 F CFA) échoit à ‘’Karma’’ de l’Egyptien Khaled Youssef et le bronze (5 000 000 F CFA) est revenu à ‘’Fatwa’’ du Tunisien, Ben Mohmound. Le Burkina Faso s’en est sorti avec trois trophées. Il s’agit du meilleur décor remporté par le long métrage ‘’Desrances’’ de Apolline Traoré, l’Etalon d’or dans la catégorie documentaire long métrage avec Aïcha Boro pour son œuvre ‘’Le loup d’or de Balolé’’ et ‘’Maison de retraite’’ de Ismaël Césaire Kafando de l’Institut supérieur de l’image et du son (ISIS), lauréat du deuxième prix des films écoles.

Investir dans le cinéma

Le ballet national du Rwanda a émerveillé le public présent à la clôture de la biennale du cinéma africain.

La cérémonie de clôture, riche en couleurs, s’est déroulée le 2 mars 2019 au Palais des sports de Ouaga 2000 en présence des présidents, Roch Marc Christian Kaboré, Ibrahim Boubacar Kéita du Mali, Paul Kagamé du Rwanda, et de l’ancien chef d’Etat ghanéen, Jerry John Rawlings et d’un parterre d’invités et de cinéastes.

Le président du Faso, Roch Marc Christian Kaboré, a félicité le lauréat de l’étalon d’or de Yennenga ainsi que tous ceux qui ont été primés. «Je pense que c’est au prix de beaucoup d’efforts que ces prix ont été reçus», a soutenu le chef de l’Etat burkinabè. Il a fait savoir que les recommandations issues des fora de cette biennale seront étudiées et prises en compte pour une meilleure valorisation de la culture africaine. «Il faut que nous travaillons à ce que les Etats investissent dans la culture et dans le cinéma pour aider les différents artistes», a affirmé le président Kaboré. A ce propos, l’Union européenne a donné une contribution de 100 millions de francs CFA au FESPACO au profit des trois films longs métrage primés.

Le président Rwandais pour sa part, a dit que le FESPACO est un cadre fédérateur qui permet une meilleure valorisation des connaissances et des cultures africaines. «Je suis honoré par le Burkina Faso et je remercie le Président du Faso pour le choix porté sur le Rwanda pour être invité d’honneur de ce festival», a-t-il déclaré. De son côté, le délégué général du FESPACO, Ardiouma Soma, a dressé un bilan positif du cinquantenaire. Une édition, a-t-il indiqué, qui a permis de décerner des prix d’une valeur de plus de 145 millions francs CFA.

« Je salue le dévouement des forces de défense et de sécurité qui ont contribué à la réussite de cet évènement. C’est le Burkina Faso tout entier qui est honoré », a dit M. Soma. Il a rappelé que le festival, placé sous le thème : «Mémoire et avenir des cinémas africains», a enregistré 434 séances de projections en huit jours dans neuf salles et 68 séances de projection dans les quartiers de la ville de Ouagadougou et à la périphérie.

Gaspard BAYALA
gaspardbayala87@gmail.com


 

Qui est l’Etalon d’or ?

Pour le lauréat Joël Karekezi, ce trophée est une preuve que la jeunesse africaine doit continuer à se battre pour s’imposer par la qualité et l’abnégation.

Joël Karekezi est un scénariste, réalisateur et producteur rwandais, né le 12 décembre 1985. Il perd son père à l’âge de 8 ans dans le génocide rwandais. Il a fait des études en biologie-chimie-éducation. Il a, par la suite, appris la réalisation de films en ligne dans une école canadienne. En 2011, il a réalisé un long métrage, «Le Pardon». Ce film a remporté le prix Golden Impala au Amakula International Film festival en Ouganda et a été présenté dans des festivals comme le festival international du film de Göteborg, le festival international du film de Seattle en 2013, le festival international du film de Chicago et au FESPACO en 2013. Son film, ‘’The Mercy of the jungle’’, sorti en 2018, a été tourné au Rwanda et en Ouganda. Avant de remporter l’étalon d’or de Yennenga, le film avait été présenté dès sa sortie au festival de Toronto et au festival international du film francophone de Namur. Le script de ‘’The Mercy of the jungle’’ avait remporté le CFI Best Audiovisual Award pour le projet audiovisuel le plus prometteur à Durban FilmMart en 2012.

G.B


Palmarès complet du 26e FESPACO

Prix des Ecoles africaines de Cinéma soutenus par Canal+ :
2e Prix : ‘’Maison de retraite’’, d’Ismaël Césaire Kafando (ISIS-SE) du Burkina Faso d’une valeur d’un million FCFA,
1er Prix : ‘’Incompris’’, de Jaurès Koukpemedji, (ISMA) du Bénin estimé à 2 millions de FCFA

Films d’animation :
Prix du jury : ‘’Da Tsysy Da’’ de Tojo Niaina Rajaofera de Madagascar, d’une valeur d’un million de FCFA,
2e Prix : ‘’Un Kalabanda a mangé mes devoirs’’ de Raymond Malinga de l’Ouganda, d’une valeur de 2 millions FCFA,
1er Prix : Briska, de Nadia Rais de la Tunisie estimé à 3 millions de F CFA

Séries TV africaines soutenues par Canal+
2e Prix : ‘’Blog’’ de Melyou Akré Loba Diby de la Côte d’Ivoire estimé à 1 million de F CFA,
1er Prix : ‘’Petites histoires, grandes vérités’’ de Ambrose B. Cooke du Ghana d’une valeur de 2 millions FCFA

Catégorie Documentaire court Métrage
Poulain de Bronze du film documentaire : ‘’Tata Milouda’’ de Nadja Harek (Algérie/France) d’une valeur de 2 millions FCFA ;
Poulain d’Argent du film documentaire : ‘’Ainsi parlait Félix’’, de Nantenaina Lova de Madagascar, estimé à 3 millions de F CFA,
Poulain d’Or du film documentaire : ‘’Contre toute attente’’, de Charity Resian Nampaso & Andréa Iannetta (Kenya/Italie), d’une valeur de 5 millions de F CFA

Documentaire long Métrage
Prix Paul Robeson de la 1re œuvre documentaire de la Diaspora : ‘’Mon ami Fela’’ de Joel Zito Araujo du Brésil d’une valeur de 2 millions CFA;
Etalon de Bronze du film documentaire: ‘’Whispering truth to powerde’’ Shameela Seedat, (Afrique du Sud) estimé à 3 millions FCFA ;
Etalon d’Argent du film documentaire : ‘’Au temps où les arabes dansaient’’ de Jawad Rhalib du Maroc estimé à 5 millions FCFA ;
Etalon d’Or du film documentaire: ‘’Le loup d’or de Balolé’’ de Aicha Boro Leterrier du Burkina Faso, d’une valeur 10 millions de F CFA.

Catégories Fiction

Court métrage fiction :
Poulain de Bronze : ‘’Un air de Kora’’, de Angèle Diabang du Sénégal estimé à 2 millions FCFA ;
Poulain d’Argent : ‘’Une place dans l’avion’’, de Khadidiatou Sow du Sénégal d’une valeur de 3 millions F CFA ;
Poulain d’Or : ‘’Black Mamba’’ de Amel Guellaty de la Tunisie d’une valeur de 5 millions FCFA

Long métrage fiction :
Prix Oumarou Ganda de la meilleure œuvre de long métrage : ‘’Jusqu’à la fin des temps’’ de Yasmine Chouikh de l’Algérie d’une valeur de 2 millions FCFA ;
Prix du meilleur montage : ‘’Mabata Bata’’, Joãn Luis Sol De Carvalho de la Mozambique d’une valeur d’1 million CFA ;
Prix du Meilleur décor : ‘’Desrances’’ de Apolline Traoré (Burkina Faso) d’une valeur de 1 million FCFA ;
Prix de la meilleure musique: ‘’Sew the Winter to My Skin’’ de Jahmil X.t. Qubeka de l’Afrique du Sud, estimé à 1 million FCFA ;
Prix du meilleur son : ‘’Karma’’ de Khaled Youssef, (Egypte) d’une valeur d’un million de F CFA ;
Meilleure image : ‘’Mabata Bata’’, Joãn Luis Sol De Carvalho, (Mozambique) d’une valeur d’un million F CFA ;
2e meilleur scénario : ‘’Keteke’’ de Peter Sedufia, (Ghana), estimé à 3000 euros ;
1er meilleur scénario : ‘’Regarde-moi’’ de Nejib Belkadhi (Tunisie), d’une valeur de 5000 euros ;
Prix de la meilleure interprétation féminine : ‘’Samantha Mugotsia’’ dans le film Rafikide Wanuri Kahiu, (Kenya) d’une valeur d’un million FCFA ;

Prix de la meilleure interprétation masculine : Marc Zinga dans le film ‘’The mercy of the jungle’’ de Joel Karekezi (Rwanda) d’une valeur d’un million F CFA ;
Etalon de Bronze long métrage fiction : ‘’Fatwa’’ de Ben Mohmound de la Tunisie d’une valeur de 5 millions F CFA ;
Etalon d’Argent long métrage fiction : ‘’Karma’’ de Khaled Youssef (Egypte) d’une valeur de 10 millions F CFA ;
Etalon d’Or Yennenga : ‘’The Mercy of the jungle’’ de Joël Karekezi du Rwanda d’une valeur de 20 millions F CFA.

Palmarès des Prix spéciaux
Prix Félix Houphouët Boigny du Conseil de l’Entente : ‘’Résolution’’ de Boris Oué et de Marcel Sangné de la Côte d’Ivoire d’une valeur de 10 000 000 F CFA.

Prix spéciaux de l’UEMOA
Documentaire long métrage : ‘’Juma Duman’’ de Salif Traoré (Mali) d’une valeur de 8 millions CFA,
Court métrage de fiction : ‘’Le rêve brisé’’ de Bédé Modeste Ganafé Mofé Dog-Na (Burkina Faso), d’une valeur de 8 millions CFA,
Long métrage fiction : ‘’Duga’’ d’Abdoulaye Dao et de Hervé Eric Lingani (Burkina Faso) estimé à 10 millions FCFA.

Prix de la CEDEAO
Prix de la meilleure femme cinéaste de la CEDEAO : ‘’Un air de Kora’’ de Angèle Diabang (Sénégal) estimé à 10 millions FCFA,

Prix de l’intégration de la CEDEAO: ‘’Résolution’’ de Boris Oue et de Marcel Sangne de la Côte d’Ivoire d’un montant de 15 millions F CFA

Prix spécial de l’Union africaine pour la Paix et la Sécurité : ‘’Fatwa’’ de Ben Mohmound de la Tunisie estimé à 8 millions FCFA

Prix Sembène Ousmane revient à Jean-Pierre Bekolo du Cameroun avec le film “Les armes miraculeuses”. Ce prix d’une valeur de 5 000 000 F.CFA est offert par la Fondation Ecobank.

Prix de l’Assemblée nationale du Burkina Faso : “Desrances” de Apolline Traoré. Il a une valeur de 7 000 000 FCFA plus un trophée.

Prix de la Chance de LONAB : “Naabiga/Le Prince” de Zalissa Zoungrana. Une valeur de 5 000 000 FCFA.

Prix Thomas Sankara : “Black Mamba” de la Tunisienne Armel Guellaty. Le prix sera remis à la clôture officielle du FESPACO.

Prix Signis : “DUGA” de Abdoulaye Dao et Hervé Lengani, d’une valeur de 2 000 000 FCFA. Signis est une association catholique mondiale pour la Communication.

Prix de la Critique cinématographique africaine : “Indigo” de la Marocaine Selma Bargach. Un prix composé uniquement d’un trophée.

Source : FESPACO


Des acteurs se prononcent

Cheick Oumar Sissoko, Sécrétaire général de la FEPACI : « une femme pouvait remporter l’Etalon d’or »
«Je n’ai pas pu voir tous les films. Mais j’estime que si le Rwandais a été primé, c’est parce qu’il le mérite. Maintenant, je suis quelque peu surpris que les films burkinabè ne soient pas nominés dans les trois grandes catégories. Il y avait deux films burkinabè notamment «Duga» le charognard et «Desrances». Mais c’est une compétition et le jury est autonome. Maintenant, s’agissant de la cérémonie de clôture, je crois qu’il y a quelques ratés. On ne peut pas faire la proclamation de prix sans laisser la parole aux membres du jury ou au président du jury.

On a besoin de savoir pourquoi, ils ont décerné le prix, les critères qui ont milité en la faveur du lauréat ou des lauréats. Je crois que cela allait permettre une bonne compréhension. Qu’à cela ne tienne, cette année, il faut dire que les projections étaient de qualité. Mais, c’est dommage que les salles n’aient pu contenir les publics venus d’horizons divers. Je suis également satisfait du fait qu’il y a eu beaucoup de jeunes et femmes cette année. On avait toutes les raisons de croire qu’une femme pouvait remporter l’Etalon d’or. Parce que ce soit l’Algérienne, la Burkinabè ou la Tunisienne, elles ont réalisé de très bons films».

Delu Armose, cinéaste français : « L’Etalon d’or est mérité »
«L’Etalon d’Or est mérité. J’ai vraiment aimé le film lauréat. Il est d’une grande qualité esthétique et bien enchainé. Le thème est impressionnant. Parce qu’il évoque un drame humain, qui montre comment survivre dans les périodes de guerre et l’absurdité des guerres. Malheureusement, je n’ai pas pu voir le film d’Apolline Traoré parce que chaque fois, c’était salle comble. De ce que j’ai entendu, c’était un bon film. Mais dans une compétition, il y a un gagnant et je crois que le jury a jugé sur la base de la meilleure qualité et du meilleur thème».

Alain Héma, comédien burkinabè : «le jury a été très rigoureux»
«L’étalon d’or est parti au Rwanda. C’est une fierté pour le cinéma africain tout entier. Mais, je n’ai pas pu suivre le film mais je pense que c’est une question de travail et de qualité. Quand on pense que l’Etat burkinabè a mis 1 milliard francs CFA afin que nos réalisateurs puissent être présents dans le palmarès, mais je crois que quand l’appui vient de façon tardive, cela joue sur la qualité. Parce que le jury a été très rigoureux sur les différents critères. C’est pourquoi, je propose que si l’on doit accompagner les réalisateurs, il faut leur donner les moyens à deux ans, minimum afin qu’ils se préparent correctement».

Bakari Bamba, comédien ivoirien : «c’est du très beau travail »
«C’est un prix bien mérité. J’ai vu le film et c’est du très beau travail. J’ai apprécié mais chacun avait son film dans sa tête. Mais, je pensais à la Tunisie ou à l’Egypte. Mais le Rwandais, je ne suis pas surpris, je suis très content pour lui. Les Burkinabè travaillent bien mais dans une compétition, c’est le meilleur des meilleurs que l’on prend».

Propos recueillis par Gaspard BAYALA

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