Demain, 23 février 2019 et ce jusqu’au 2 mars prochain, le Burkina Faso va abriter le 26e Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (FESPACO). Une célébration qui coïncide avec les 50 ans de la biennale du 7e art africain. Des cinéastes africains, présents dans la capitale burkinabè, sont unanimes quant à l’appartenance de ce festival à la même culture africaine.
Cheick Omar Sissoko, cinéaste malien et SG de la FEPACI : « Le FESPACO est parti des films de libération de l’Afrique »
Le FESPACO est un évènement panafricain de la culture et des arts qui permet aux cinéastes de rencontrer les populations au tour de leurs images. Cette année, même si je n’ai pas de film en compétition, j’organise le congrès de la Fédération panafricaine des cinéastes (FEPACI), entièrement pris en charge par le FESPACO. Au cours de cette célébration des 50 ans, le premier bilan à relever, c’est le fait que le festival ait existé et survécu sur le continent.
Une pérennité due aussi à la volonté politique des différents gouvernements burkinabè. En 50 ans, le FESPACO a connu une grande mobilisation de par la présence massive des jeunes et des femmes et des acteurs à travers le monde. Nous avons, de nos jours, beaucoup d’œuvres avec une diversité de créations. Avec ces nouvelles tendances, ce n’est plus des cinémas pour l’indépendance ou la libération de l’Afrique, mais ceux des cultures urbaines africaines.
Mohamed Nadjib Lamraoui, réalisateur algérien : « le FESPACO est un évènement magnifique»
C’est la première fois que je participe au FESPACO ; manifestation à laquelle je tenais à être présent, car j’en ai tellement entendu parler. Selon les informations qui me parvenaient, le FESPACO est un évènement magnifique à ne pas rater. Je perçois cette présence comme un sentiment d’appartenance à l’Afrique, parce que depuis longtemps les pays magrébins ont tourné le dos à l’Afrique.
Ce qui est dommage parce qu’il y a une grande culture africaine imprimée en nous dont on n’en profite pas. C’est donc un plaisir de participer à un festival aussi grand, l’un des meilleurs et le plus grand en Afrique. Pour cette première participation, j’ai un court métrage en compétition intitulé la « page blanche ». C’est un film qui décrit le syndrome psychologique dont souffrent beaucoup de créateurs notamment les écrivains.
Nadia Rais, réalisatrice tunisienne: « En Tunisie, nous n’avons pas cette forme de manifestation culturelle »
Je suis très contente d’être là dans un pays que je découvre pour la première fois, même si j’ai déjà entendu parler du festival. Le Maghreb s’est très éloigné des pays africains dont nous avons besoin pour nous identifier.
Malheureusement, en Tunisie, nous n’avons pas cette forme de manifestation culturelle avec laquelle nous arriverons à nous imprégner des réalités africaines. Cela est dommage pour le monde arabe. Le FESPACO est une question d’identité et d’appartenance à la culture africaine. À ce sujet, j’ai un film court métrage en compétition, Briska animation, ma 4e œuvre d’animation, une adaptation de Ahl al kahf de Tawfiq al-Hakim (Egypte, 1933).
Laure Azoumi Guiré, présidentede l’association burkinabè des comédiens de cinéma : « Les comédiens sont à l’honneur cette année »
Cette célébration coïncide avec les 50 ans du festival. Ce qui me fait plus plaisir, c’est l’implication des comédiens dans l’organisation du cinquantenaire. Pour cette année, le président du comité d’organisation a souhaité une très grande visibilité des comédiens. Et en tant que membre du comité national d’organisation, c’est très bien parti pour le cinquantenaire.
Avec les différentes activités au programme, c’est une grande et belle fête qui nous attend. Je suis dans aucun film mais nous avons un sketch pour parodier et rendre hommage aux réalisateurs Idrissa Ouédraogo et Missa Hébié le jour de la libation. Nous avons aussi des plateaux d’animation qui offrent plus de places aux comédiens.
Zouli David Ouédraogo, comédien burkinabè : « Je souhaite que l’Etalon d’or reste au Burkina»
Pour l’édition 2019, je souhaite que l’Etalon d’or de Yennenga reste au Burkina Faso, car cela fait très longtemps que le pays n’a plus remporté ce trophée. A ce sujet, je demande aux réalisateurs de soigner l’image du cinéma burkinabè en faisant jouer les comédiens professionnels au lieu de faire des réalisations par affinité et par cooptation, car dans le domaine du cinéma, on ne peut pas tricher.
De façon générale, en 50 ans le festival a grandi et évolué positivement surtout avec le numérique. Déjà, le fait de tenir le FESPACO à chaque édition est un challenge qu’il faut saluer.
Pape Badiara Seck, producteur, réalisateur, scénariste sénégalais : « Pour plus de compétitivité, il faut des contenus forts ».
Les 50 ans du FESPACO sont un événement très important qu’il faut célébrer. Pour ce cinquantenaire, il convient de faire une halte pour l’apport de la biennale dans le travail des acteurs. En entendant ce bilan, il faut une unité des acteurs et ce, à travers le cinéma panafricain. Le début du cinéma africain a été très difficile avec un cinéma artisanal.
C’est ce que Sembène Ousmane a appelé le « mégotage » à l’image du fumeur débutant ou sans moyen. Au fil du temps, les Etats africains ont pris conscience de l’intérêt culturel du cinéma et se sont investis. Toutefois, ils ont soutenu le cinéma sans donner assez de pouvoir aux cinéastes. Nollywood, sans attendre l’Etat, est arrivé à s’autonomiser à travers la rentabilité des films. Maintenant pour plus de compétitivité à l’international, il faut aux réalisateurs africains des films avec des images et des contenus forts.
Mariam OUEDRAOGO