Un opportunisme indécent

S’il y a une information qui alimente les débats et cristallise l’attention au sein de l’opinion publique nationale, c’est bien la récente vague, de démissions de militants, enregistrée au sein des partis politiques. L’hémorragie a surtout touché l’ex-parti au pouvoir, le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP). 46 cadres du parti, et non des moindres, dont des anciens parlementaires ont, à travers une note du 21 mars 2022, signifié leur démission du parti du Soleil levant et de toutes ses instances.

De nombreux observateurs de la scène politique nationale ont, en effet, été quelque peu abasourdis par ces démissions pour le moins inattendues. Cela, au regard du contexte sociopolitique actuel dans lequel celles-ci interviennent. Surtout quand on sait que l’ex-président, Roch Marc Christian Kaboré, n’a pas encore recouvré la liberté, et en attente d’être situé sur son sort depuis le coup d’Etat du 24 janvier du Mouvement patriotique pour la Sauvegarde et la restauration (MPSR).

Sur la toile, dans les grins de thé, les commentaires vont bon train allant des plus pertinents au plus saugrenus, remettant, ipso facto, au goût du jour l’épineuse problématique du nomadisme politique au Burkina Faso. Ce mercato politique, soutiennent certains, frise l’indécence, symptomatique du manque de conviction de bien d’acteurs politiques, en quête permanente d’hypothétiques repères. Dans nos contrées, les exemples n’en manquent pas. Mais, loin de ces grandes spéculations intellectuelles, s’impose une réflexion profonde sur ces genres de comportement dans le contexte de nos démocraties balbutiantes.

Il est vrai que la liberté d’association, d’appartenir ou pas à une organisation politique est reconnue pour tous. Cependant, un parti politique devrait se fonder sur une idéologie sur laquelle elle se base pour gérer la chose publique. Et face à une telle situation, ce n’est pas trop de se demander si la conviction politique existe encore au Burkina Faso, voire sous d’autres cieux en Afrique de l’Ouest où ce type de pratiques est encore légion. La pratique est malheureusement courante au pays des Hommes intègres.

En effet, dans l’histoire politique du pays et bien plus, à une époque récente, nous avons assisté à des cas de démission au sein de partis politiques pour des raisons diverses. Toutefois, il faut le dire, elles ne sont pas de nature à consolider notre jeune démocratie dont beaucoup se réclament pourtant en être les artisans. Comment peut-on construire une démocratie et développer un pays avec de tels comportements teintés d’une versatilité sans vergogne ?

Ou encore quelles leçons donner à la jeune génération accusée, à tort ou à raison, d’être obnubilée par le gain facile et de reléguer au second plan les valeurs cardinales de notre société ? Il est difficile de répondre, pour l’instant, à ces interrogations. Ce, d’autant plus que la notion de démocratie en Afrique, malheureusement, semble être à géométrie variable pour bien de leaders politiques et même des dirigeants d’Etats, le plus souvent guidés par l’intérêt personnel. Toute proportion gardée, il serait judicieux pour nos politiciens de cultiver l’ « immobilisme » en politique afin de mieux promouvoir leur idéal, dont ils se targuent à longueur de journée.

Cela, s’ils ne veulent pas se discréditer auprès de leurs concitoyens qui deviennent, de nos jours, de plus en plus regardants sur le sens du respect, de la dignité, de l’honneur et de la parole donnée. Le moins que l’on puisse dire est que les autorités actuelles gagneraient, autant que faire se peut, à prendre la pleine mesure de ce genre « d’errements » en légiférant dans ce sens.

Et la période de Transition politique qui s’offre, se présente comme une occasion à l’Assemblée législative de la Transition (ALT) de prendre des textes de lois pour moraliser l’activité politique et bien d’autres secteurs au pays des Hommes intègres. Car, au-delà de la sphère politique, ce sont les valeurs de courage, d’honneur, de persévérance, de fidélité et de résilience aux vicissitudes de la vie quotidienne qui devront caractériser le Burkinabè intègre. Et chacun doit travailler dans ce sens.

Soumaïla BONKOUNGOU

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