En terre russe pour prendre part à la célébration du 80e anniversaire de la victoire de la Russie dans la Grande guerre, le Président du Faso, le capitaine Ibrahim Traoré, a accordé une interview à la chaine de télévision Russia Today (RT). Dans cet entretien, il évoque son séjour, la coopération de son pays avec la Russie, la lutte contre le terrorisme et l’impérialisme notamment.
Vous avez assisté au défilé du 9 mai. Quelles sont vos impressions ?
Nous sommes en Russie pour la commémoration du 80e anniversaire de la victoire sur le nazisme et comme vous l’avez dit, nous avons assisté à la cérémonie, une parade, une cérémonie sur le dépôt de gerbes sur la tombe du soldat inconnu. Je pense que c’est très symbolique. Nous avons appris beaucoup de choses au cours de ce séjour. Ce n’était pas uniquement une fête, mais c’est une célébration de la victoire d’un nouveau monde. Donc, cela a beaucoup de sens pour.
Qu’est ce que vous pensez de la qualité du défilé ?
C’était parfait et cela nous a fait apprendre beaucoup de choses. Quand on fait défiler les engins qui ont gagné la guerre, c’est-à-dire, les T-34 jusqu’aux engins modernes, cela nous montre l’évolution technologique de l’armée russe et nous inspire à nous mettre au travail pour pouvoir nous développer dans le même sens.
Est-ce qu’il y avait certaines choses qui vous ont surpris par exemple ?
On est toujours surpris quand on voit l’avancée technologique. Dernièrement, je pense qu’il y a une nouvelle arme qui a fait son apparition dans l’arsenal militaire russe, Orychnik que nous avons pu voir passer. C’est très significatif.
Quelle est la signification de votre présence en tant que chef d’Etat africain, car on sait bien que des Africains ont apporté leur contribution à la victoire des Alliés dans la Seconde Guerre mondiale ?
Les Africains et les soldats soviétiques ont contribué beaucoup à libérer le monde du nazisme et si le monde n’était pas libéré du nazisme, on ne sait pas ce que ça allait devenir. En suivant les événements, j’ai vu que la Russie elle seule a perdu un million de soldats sur le sol européen en combattant. L’Afrique aussi a donné, nos ancêtres ont beaucoup combattu sur le théâtre européen principalement en France, en Belgique, en Italie pour libérer le monde du nazisme. Donc, c’est une histoire commune que nous partageons.
Comment s’est déroulée la rencontre avec le président russe ?
Pour l’instant, nous avons eu des rencontres brèves et dans quelques temps, nous allons avoir un long entretien. Ça se passe très bien et vraiment c’est très courtois, amical, fraternel. C’est tout ce qu’on demande en matière de nouvelles coopérations dans ce monde.
Mais comment décririez vous l’état actuel des relations bilatérales ?
Les relations se portent très bien et je peux dire que depuis deux ans maintenant, les relations ont très bien commencé et nous sommes en train d’approfondir les volets défense et sécurité mais aussi le volet éducation. Plus tard, le volet commercial. Nous avons échelonné les différents volets pour qu’on puisse échanger, partager beaucoup d’expériences parce que nous avons beaucoup à apprendre sur le volet éducation de la Russie notamment dans les sciences.
Notamment dans les sciences, mais dans quel domaine en particulier ?
Il y a beaucoup de domaines dans les sciences que ce soit les mathématiques, la physique, la chimie. Ce sont des domaines qui nous intéressent beaucoup tant sur le développement
de notre industrie, mais aussi dans le développement commercial, économique de notre pays. Ce sont des volets que nous allons chercher à approfondir pour mieux nous structurer.
Pensez vous qu’il y ait une demande au Burkina pour l’enseignement russe ?
Bien sûr. Il y a beaucoup d’étudiants burkinabè déjà en Russie dans des universités. J’en ai croisé ce matin et j’ai même demandé à ce qu’on augmente le nombre d’étudiants ici que ce soit à travers des bourses russes ou le Burkina qui va donc payer des bourses pour que ces étudiants viennent. Mais l’objectif pour nous, c’est d’implanter des universités similaires au Burkina et comme il y a déjà la Maison de la Russie, cela va nous permettre d’aller très vite.
Vous avez visité l’université russe. Comment s’est déroulée cette visite ?
Cela s’est très bien déroulé. J’ai eu des échanges fructueux avec le ministre de l’Education de la Russie, les recteurs et surtout les étudiants de l’AES dans cette université. Nous avons eu de très bons échanges. Nous avons beaucoup parlé de matières scientifiques.
Parlons un tout petit peu d’économie. Le volume des échanges commerciaux a augmenté de dix fois en un an, mais de l’autre côté ces chiffres ne sont pas à la hauteur du dialogue politique. Comment expliquez-vous ce paradoxe et surtout comment booster ces liens dans le domaine du commerce ?
C’est une nouvelle relation qui commence avec la Russie.
Pourquoi nouvelle ?
Cela recommence puisque depuis des années, après la mort malheureusement de Sankara, les relations avec la Russie se sont beaucoup estompées et là nous sommes en train de réveiller les relations. L’ambassade s’est installée et les relations commerciales sont aussi au cœur des échanges. Un certain nombre de produits par exemple burkinabè transitaient par certains pays européens avant d’être vendus en Russie. Aujourd’hui, ces produits sont directement vendus à travers des opérateurs burkinabè et russes. On prend l’exemple des mangues qui transitaient par des pays européens pour être vendus en Russie. Aujourd’hui, cela se passe directement. Il y a le coton qui va suivre. Il y a beaucoup d’autres produits, le sésame et bien d’autres produits agricoles que nous pourrons échanger directement avec la Russie. Cela ne fait que commencer et va s’accroître.
Les prévisions économiques indiquent une croissance de 5,6% en 2025. Alors quels sont les secteurs clés qui soutiennent cette croissance ?
Jusqu’aujourd’hui au Burkina Faso, c’est l’or qui est le premier produit d’exportation. Mais nous avons lancé le moteur de l’agriculture pour d’abord l’autosuffisance mais aussi pour le commerce extérieur, l’exportation. Si vous suivez bien depuis l’année passée, nous avons lancé l’offensive agricole avec une initiative qui soutient l’offensive. L’objectif, c’est de pouvoir accroître notre production agricole de façon significative, s’autosuffire. Mais aussi, il y a des produits de rente qu’il faille vendre à l’extérieur et tout cela doit pouvoir soutenir cette croissance. Nous espérons être au-dessus de ces chiffres.
Comment se déroulent ces réformes ?
Ce sont des réformes difficiles, il faut le reconnaître parce qu’il y a un système qui s’est installé. Mais ce n’est pas impossible. Déjà quand vous regardez notre production céréalière, il y en a une très bonne croissance. En 2024-2025, nous espérons encore faire mieux. Ce sont des réformes assez courageuses. Je reste toujours dans l’agriculture. Nous nous avons par exemple décidé à travers l’initiative et l’offensive, de labourer gratuitement les champs de nos paysans. L’année passée, on l’a fait. Cette année encore s’il plaît à Dieu au retour, il y a un bon nombre de tracteurs qu’on a acquis qu’on va mettre à la disposition des cellules mécanisées dans les différents départements pour accroître les superficies emblavées. Nous maximisons beaucoup dans la gestion de l’eau à travers une structure qu’on a créée, l’ONBAH, pour maîtriser l’eau et pouvoir produire au moins deux trois fois dans l’année parce que si on dépend uniquement des pluies, ce serait difficile. Il y a le secteur minier aussi que nous allons continuer de booster pour que le pays exploite ses propres ressources. Nous avons commencé à acquérir des mines. Il y a beaucoup de permis qui sont là que nous sommes en train de développer. Nos ingénieurs ont pu développer les machines nécessaires pour qu’on puisse exploiter nous-mêmes nos ressources. Si on met à profit ces deux secteurs et compléter avec l’industrialisation, c’est-à-dire, la transformation de nos produits sur place qui va nous empêcher d’exporter brut, cela va beaucoup nous amener à entraîner une très bonne croissance. Ce sont ces réformes qui sont en cours, l’agriculture, l’industrie et beaucoup de secteurs.
Pensez vous que la Russie puisse apporter son soutien pour la mise en place de ces réformes ?
Bien sûr. Beaucoup de soutien. Rien que la formation technique et professionnelle, c’est déjà une très bonne chose. Si nous payons des industries, il faut bien des gens qui vont les entretenir et les faire marcher et la Russie nous aide dans ce volet. C’est pourquoi, j’ai dit que nous avons une très bonne coopération avec le ministère russe de l’Education. Ils vont nous permettre de former des techniciens, des ingénieurs qui doivent pouvoir entretenir tout ce que nous faisons mais créer nous-mêmes nos propres unités industrielles. Cela est très important pour nous. Dans le commerce aussi, comme je l’ai dit tout de suite, avec la Russie, cela se passe très bien. Il n’y a pas de raison qu’on ne puisse pas approfondir tout cela.
Quelle est la situation sécuritaire actuellement dans votre pays et d’ailleurs dans la région ?
Dans la région comme vous savez, la situation sécuritaire, nous essayons d’évoluer sur les champs de bataille. C’est la première des choses parce qu’il y a plusieurs facteurs qui rentrent en ligne de compte. Sur les champs de bataille il y a de l’évolution. Si on prend de 2023 à aujourd’hui, nous avons pu récupérer beaucoup de zones que nous avons pu pacifier. N’empêche que l’ennemi se renforce aussi. Il y a beaucoup de combattants étrangers qui rejoignent les terroristes.
Est-ce que vous pouvez préciser ?
Oui, les terroristes sont renforcés par beaucoup de combattants étrangers. Le cas du Burkina, il y a beaucoup de criminels qui sont au Burkina mais qui ne sont pas Burkinabè. Il y a aussi des formateurs qui viennent de beaucoup de pays pour leur apprendre beaucoup de techniques.
Mais quel est leur intérêt ?
Ce n’est pas du terrorisme. C’est de l’impérialisme. L’objectif pour eux, c’est de nous maintenir dans une guerre permanente afin qu’on ne puisse pas se développer et continuer à payer nos richesses. Ils ont tout intérêt à amener des spécialistes pour poser divers types de mines, des explosifs. Aujourd’hui, les terroristes utilisent des drones pour faire le combat. Ce sont des professionnels venus de certains pays qui viennent leur apprendre tout cela. Tout cela, c’est pour continuer à nous maintenir dans une situation d’insécurité. Mais nous prenons la mesure de la chose. Nous nous adaptons à chaque fois à leur mode d’action et nous continuerons le combat jusqu’à récupérer l’entièreté du Sahel.
Concrètement, y a-t-il des pays qui financent ces combattants ?
Tous les pays impérialistes financent ces combattants. Ils sont nombreux, on ne peut pas les citer individuellement. Il y en a qui sont même cachés, qu’on ne peut pas imaginer, mais ils sont nombreux.
Il y a ceux qui ne sont pas cachés qui le déclarent ouvertement, je parle du récent scandale avec le soutien du terrorisme au Mali. Quel regard portez-vous sur ce qui s’est passé en fait au Mali ?
C’est malheureux. Ils l’ont déclaré ouvertement qu’ils soutiennent les terroristes. Nous avons aussi pu remarquer effectivement avec un certain nombre de technologies que ce que les terroristes ont pu avoir vient d’eux. C’est très malheureux. Mais toujours est-il qu’on ne s’apitoie pas sur notre sort. Nous avons pris la mesure de la chose. Nous allons nous adapter, les combattre et ils ne pourront pas vaincre. C’est cela le plus important pour nous.
Comment se poursuit la coopération humanitaire entre le Burkina Faso et la Russie ?
Elle se poursuit très bien. Je pense qu’il y a beaucoup d’échanges sur beaucoup de volets. Quand je prends le domaine de la santé parce qu’on a toujours des déplacés qui sont là et quand on dit un camp de déplacés cela veut dire qu’il y a des situations sanitaires souvent compliquées. Les services de santé coopèrent bien pour appuyer le service de l’action humanitaire pour pouvoir avancer. Vous avez suivi en 2023, la Russie a fait un don de blé au Burkina Faso. C’était uniquement destiné aux personnes déplacées. Mais nous avons fait la promesse au Président Poutine que nous ne souhaitons plus être ravitaillés en blé parce que nous allons produire le blé. Je tiens cette promesse parce que nous avons commencé à produire notre blé en quantité pour nous satisfaire. Ce qui veut dire que la coopération sur ce volet là nous amène nous-mêmes à nous développer, à booster beaucoup de choses pour pouvoir combler les vides.
Face aux tensions géopolitiques actuelles, notamment la guerre en ttarifaire entre les Etats-Unis et la Chine, comment le Burkina Faso adapte-t-il sa stratégie économique et diplomatique ?
Ce monde est en perpétuelle mutation. C’est de la folie souvent les choses qu’on voit. Il faut rester aux aguets et pouvoir s’adapter à tout moment. C’est très important parce que nous suivons l’actualité. Il y a une bataille économique un peu partout. Mais a priori, nous commerçons avec la Chine sans problème. Nous achetons beaucoup de choses de la Chine et les Chinois achètent beaucoup de choses chez nous. Il y a des entreprises chinoises qui s’installent chez nous malgré le fait que les gens essaient de dénigrer le Burkina Faso. C’est pareil avec la Russie actuellement. Donc tous les pays qui se battent aujourd’hui pour leur indépendance économique, nous essayons de collaborer mieux avec eux parce que c’est une forme d’oppression de l’impérialisme. Il y a lieu que ceux qui sont opprimés s’unissent pour faire face à cette hégémonie. A priori, on s’adapte à toute cette situation.
Quel regard portez-vous sur la récente détérioration des relations avec
l’Algérie ?
Vous avez suivi les événements et je pense que tout le monde comprend comment cela fonctionne. Nous sommes au regret de voir l’incident qui est arrivé à la frontière algérienne avec le drone qu’ils ont abattu. Il faut le dire clairement, c’est n’est pas amical parce qu’on n’a pas un appareil volant comme ça. Tout le monde connaît le protocole. Donc il n’y a pas à se voiler la face. Si un appareil traverse votre frontière, même s’il rentre sur le territoire de pays, on l’identifie. Les radars permettent de l’identifier et on sait à quel pays il appartient. Et il y a les relations diplomatiques pour cela. On contacte l’ambassade et il y a des attachés de défense et beaucoup de mécanismes. On les contacte et ils peuvent confirmer si c’est leur appareil ou pas. S’il est sur le territoire, peut-être qu’il a besoin d’aide ou bien il a perdu l’orientation. Tout cela, parce qu’un appareil peut être en l’air et peut avoir des problèmes avec la météo et il est obligé de se cacher derrière le nuage. Cela arrive très souvent dans nos pays. Donc un appareil rentre dans notre espace aérien. Quand on leur demande, ils disent qu’il y a beaucoup de couverture nuageuse mais en tout cas, un phénomène météorologique qui l’amène à venir passer par-là. Il peut avoir un problème technique et demander de l’aide pour qu’on le guide à ce qu’il atterrisse. Donc ,il y a tellement de facteurs qui peuvent faire qu’un appareil se retrouve dans un espace aérien. On n’abat pas un appareil systématiquement. Le cas est arrivé avec nous. On a vu un appareil américain qui rentrait sur notre territoire et qui faisait des reconnaissances. On ne l’a pas abattu. On a pris le soin de contacter l’ambassade américaine qui a pris quelques minutes et a confirmé que c’est leur appareil et ils ont dégagé l’espace. On n’abat pas un appareil systématiquement. C’est un acte délibéré, inamical d’abattre l’appareil et c’est regrettable.
Mais si je comprends bien, vous ne fermez pas la porte au dialogue quand même ?
Non. Il faut que les dirigeants comprennent que nous n’avons pas le choix que de nous unir face à cette situation de soi-disant terrorisme parce que c’est un phénomène assez complexe. Je vous dis que le Burkina était assis, dans les années 2012, à regarder le Mali. Le régime qui était en place était amis avec ces gens là. Certains vivaient même à Ouagadougou. Iyad Ag Ghali a vécu à Ouagadougou. C’est la réalité mais, qu’est ce qui se passe aujourd’hui ? Ils se sont retournés contre nous. Ce ne sont pas des gens libres. Ils sont manipulés par les impérialistes et les ordres qu’on leur donne, ils les donnent à leurs criminels sur le terrain et ils les exécutent. Il faut donc que chacun comprenne qu’on doit s’unir pour faire face. Il n’y a pas de négociation possible avec ces gens là.
Justement, en parlant de cette unité, plutôt cette intégration qui se déroule actuellement au sein de l’AES, où en est-on actuellement ?
Ça se passe bien. Ça évolue. Nous sommes dans la Confédération. Il y a beaucoup de choses à mettre en place et il ne faut pas chercher à aller trop vite et ne pas bien faire. Donc, nous sommes en train d’aller de manière progressive. Il y a beaucoup de structures à mettre en place, beaucoup de volets à mettre à niveau dans les trois pays parce que vous n’êtes pas sans savoir que sur le point de vue économique, on n’est pas au même niveau, tout comme sur le point de vue militaire. Il y a beaucoup de volets qu’il faut essayer d’équilibrer et cela nécessite la mise en place de beaucoup de structures, beaucoup de rencontres. La libre circulation nécessite un certain nombre de paramètres à mettre ensemble. Vous avez dû voir qu’on a fait un gros travail pour aboutir à un document unique de sécurité pour les voyages. C’est évolutif et ça se passe très bien.
Sur le volet économique, la création de la devise propre à l’AES est elle toujours à l’ordre du jour ?
Oui. C’est à l’ordre du jour forcément. Le processus continue. Il y a beaucoup billes à caller avant d’y arriver mais c’est forcément à l’ordre du jour. Si on parle de souveraineté, on a forcément besoin de cette souveraineté. C’est impératif.
Peut-on s’attendre à l’élargissement de l’AES ?
Oui. Dans le futur, mais pour l’instant, nous devons harmoniser nous-mêmes beaucoup de choses, mettre en place vraiment les bases parce qu’il y aura beaucoup de protocoles additionnels pour harmoniser nos politiques. Que ce soit les politiques diplomatiques ou économiques avant de permettre à ce que quelqu’un puisse s’ajouter.
Mais, il y a-t-il déjà des pays qui s’intéressent à votre format ?
Oui. Des pays s’y intéressent. Pour l’instant, le président de la Confédération c’est le président malien. Il pourra donner son avis sur la question, mais il y a des pays qui s’y intéressent.
Comment vous expliquez la baisse de l’influence française dans la région ; pas uniquement dans le Sahel, mais aussi dans l’Afrique de l’ouest par exemple ?
Je pense que ce sont eux-mêmes qui ont contribué à baisser leur influence parce qu’ils ont une conception paternaliste de nos relations. Quand vous prenez tout ce qu’on fait, tout ce qu’on prend comme initiative, ils estiment que c’est la Russie. Quand quelqu’un parle : il est influencé par la Russie. Tout ce qui s’est passé, c’est la Russie. Pourquoi ils ont les yeux fermés comme ça ? Donc, l’Africain n’est pas capable de développer quelque chose, d’inventer, d’innover, de prendre des initiatives ? C’est cela que nous combattons et tant qu’ils vont continuer de voir l’Africain comme un sous-homme qui n’est pas capable de réfléchir, d’innover, d’inventer, on ne pourra jamais être ami. Les choses et les époques ont changé. Donc, c’est la vision même qu’ils ont du Noir. Il faut qu’ils arrêtent cela parce qu’en nous traitant ainsi, c’est comme s’ils voient le Noir comme un sous-homme et là c’est dangereux. Il faut qu’ils changent de langage.
Mais cette attitude se voit ?
Regardez dans leur discours. Même le président français, toujours dans ses discours, il dit que les jeunes africains sont influencés par la Russie. Les médias occidentaux ne passent leur temps qu’à mentir. Regardez aujourd’hui l’AES qui est un modèle qui est en train de se dessiner. Ils ne peuvent pas faire une journée sans parler du Burkina ou de l’AES. C’est impossible pour eux et chaque fois, ils cherchent à diffuser des informations pour diviser, pour manipuler la jeunesse mais ça ne passe plus. Je pense que les gens sont assez conscients. Ils ont ouvert l’œil.
Vous tous, vous êtes victimes de ces gens et de leur communication à travers ce qu’ils font et disent sur la Russie. Jusqu’aujourd’hui, il y a des jeunes africains qui ont les yeux toujours fermés, qui croient à leur mensonge. J’écoutais la dernière fois quelqu’un dire qu’à la fin de la seconde Guerre mondiale, dans les dix années qui ont suivi, si on demandait en Europe qui a gagné la guerre, les gens disaient que c’est la Russie. Mais aujourd’hui, si vous demandez en Europe qui a gagné la guerre, ils vont dire que ce sont les Occidentaux. Par la communication ils ont réussi à renverser l’histoire et l’histoire africaine, ils ont tout manigancé pour faire passer les mensonges. Ça fait que certains jeunes africains ne connaissent même pas l’histoire de l’Afrique et ce qu’elle fait. Cela a fait que certains ne savent même pas que nos grands parents ont combattu, ont été mis à l’avant comme chair à canon et au retour, ils les ont tués comme des animaux. Est-ce que les gens savent que quand la France expérimentait sa première bombe atomique ce sont des soldats noirs qu’ils ont mis à côté dans le rayon létal pour voir l’effet que ça fait ? Sortons les archives. C’est terrible, tout ce qu’ils ont utilisé contre l’Afrique. Il y a tout cela qu’il faut communiquer pour que les jeunes africains comprennent parce qu’il y a beaucoup sont encore endormis et continuent de communiquer pour les impérialistes. Ce qu’ils leur disent, ils le font, peut-être parce qu’ils leur donnent quelque chose. Mais l’Africain doit comprendre son histoire et se réveiller. Donc c’est notre combat.
Quel est le rôle des médias dans ce combat, selon vous ?
Les médias devraient beaucoup participer à nous aider. Mais vous voyez que nos médias même, certains médias sont des médias impérialistes. C’est lorsque les médias européens disent quelque chose qu’ils reprennent et accentuent. Il y a plein de médias dans le pays qui combattent même les régimes comme notre régime et passent leur temps à raconter les mêmes balivernes que les médias occidentaux. Mais c’est honteux si des Africains se comportent comme ça. C’est très honteux. J’imagine qu’il doit avoir honte de se regarder dans la glace le soir. Si tu es payé pour raconter des mensonges sur le Noir, c’est très grave. On est en train de conscientiser au Burkina. Actuellement, beaucoup de médias accompagnent la dynamique et participent à conscientiser la jeunesse à travers des débats. C’est ce que nous souhaitons vraiment pour les médias.
Pensez-vous que notre média puisse aussi jouer son rôle dans ce combat ?
Bien-sûr. Beaucoup. Il faut jouer un rôle très important parce, je l’ai dit en 2023 à Saint-Pétersbourg et je le répète encore aujourd’hui, la Russie a contribué à sauver le monde. L’Afrique a contribué à sauver le monde. Il faut le dire. Il faut que les jeunes le comprennent. Que tout ce qui se raconte dans les films de Hollywood sont faux. Ce n’est que du mensonge. C’est la même chose avec la guerre du Vietnam. Aujourd’hui, on voit que l’histoire est tronquée, mais il faut communiquer. Ils n’aiment pas que je parle. On trouve que je parle trop, pour que je me taise afin que leur version passe. Non ! Mon plus grand regret c’est d’avoir passé une bonne partie de ma jeunesse à écouter des radios comme RFI, France 24. J’ai été dans des pays où ces radios étaient fermées, mais on utilisait des applications pour enregistrer leur journal et écouter. Mais à partir d’un moment, il y a un déclic et j’ai commence à comprendre qu’il conditionne nos cerveaux pour accepter ce qu’ils veulent. C’est leur narratif qu’ils veulent qu’on apprenne et depuis ce temps, j’ai commencé à faire la part des choses et j’ai compris que c’est très dangereux ce qu’ils font. Aujourd’hui, plus que jamais je me rends compte qu’ils ont conditionné l’esprit, surtout des Africains. Donc vous pouvez participer beaucoup à éveiller les consciences de la jeunesse pour que les gens comprennent comment fonctionne le monde et ne pas se laisser embarquer par ces gens-là.
Quels sont les perspectives des relations entre la Russie et le Burkina Faso ?
Il y a beaucoup de perspectives à venir et comme je l’ai dit avec la parade militaire que j’ai vue, je pense qu’il y a une très bonne coopération parce qu’actuellement, nous payons du matériel, mais il faut qu’on développe l’industrie militaire par exemple. La russie peut contribuer beaucoup à cela et vous savez que beaucoup de scientifiques, de savants sont russes. La preuve, on vient de quitter dans l’université de Mendeleïev.
Ils peuvent nous accompagner dans la formation parce que chez nous, nous avons des jeunes talents, des génies qui arrivent à créer des choses mais, il leur manque l’apport mathématique, la science, pour pouvoir améliorer ce qu’ils font. Donc, la Russie peut nous aider beaucoup dans ce domaine. Cela va nous aider sur le volet militaire, sur le volet industriel parce que ce sont les machines qui font marcher le monde. Aujourd’hui, avec la technologie, que ce soit l’informatique, les réseaux, la télécommunication, on est en train de collaborer beaucoup avec la Russie. Donc à l’avenir, toutes ces perspectives seront mises à l’ordre du jour pour que nous puissions arriver à un objectif certain que nous souhaitons.
Interview retranscrite par la Rédaction