
Le championnat féminin dans le Fasofoot connait une évolution. Disputé pour la forme, il n’y a pas si longtemps, tant les niveaux des équipes étaient disparates, aujourd’hui, les matchs sont âprement disputés. Tout comme dans le championnat masculin, les résultats sont loin d’être connus à l’avance.
Le match Etincelles # Union Sportive des Forces Armées, le dimanche 9 février 2025, au stade Issoufou-Joseph-Conombo, sanctionné par le score étriqué de 1 but de part et d’autre, lors de la 9e journée du championnat féminin a été inédit. Un duel de référence au sommet de cette ligue, indicatrice de l’évolution positive du football féminin burkinabè.
En effet, à une certaine époque, le championnat féminin était marqué par des rencontres aux scores fleuves, des forfaits, des tapis verts et des matchs qui se terminaient en queue de poisson. En seulement 9 ans dans le milieu, Zakaria Zèba trouve que le football féminin burkinabè a fait un grand bond vers l’avant. « C’était la croix et la bannière pour pouvoir réunir une équipe complète.

Il n’y avait pas de joueuses, si bien que dans bon nombre de matchs du championnat, certaines équipes ne se composaient que de 7 joueuses. Souvent, le quorum n’est même pas atteint pour jouer. L’équipe est obligée de déclarer forfait », informe-t-il. De l’avis de Sabine Marie Isabelle Tall née Zoungrana, la réticence de la gent féminine dans le sport en général et particulièrement le football a été aussi un adversaire combattu ardemment dans notre société.

au sur-classement et au double sur-classement.
Pour elle, de par le passé, il était très difficile d’accepter qu’une femme puisse allier vie de foyer, fonction et sport. L’actuel sélectionneur adjoint U17 et U20 des Etalons dames, se réjouit qu’aujourd’hui, du point de vue effectif, toutes les équipes n’ont plus de soucis. « Toutes les équipes sont complètes et il y a même des remplaçantes sur les bancs de touche », se satisfait Zakaria Zèba.
Sur le plan technique, c’est-à-dire le niveau des joueuses, il y a également une nette amélioration. Le jeu produit est appréciable, fait de gestes techniques et de vivacité. Elles proposent des jeux comme chez les hommes. La preuve, il y a actuellement plus d’une dizaine de footballeuses burkinabè qui monnaient leur talent dans des championnats professionnels.
L’impulsion d’une politique favorable
Selon le sélectionneur des Etalons dames, Pascal Sawadogo, ce progrès est à mettre à l’actif de la volonté politique des premiers responsables du football burkinabè. En effet, la faitière a d’abord mis l’accent sur l’organisation avec la formation de plusieurs catégories, cadette juniore, séniore. Une différence avec le passé où c’était les mêmes équipes qui jouaient pour former un carré d’as, constitué de deux équipes de Bobo-Dioulasso et deux de Ouagadougou. Le pan de cette organisation a débuté en 2015.
En effet, depuis cette date, les équipes féminines ont été organisées en deux divisions : la première et la deuxième. Et puis la création de la troisième division à partir de 2020. Ensuite, le promoteur d’Etincelles note aussi la régularité des championnats féminins. « Ces dernières années, à chaque saison sportive, les différents clubs s’affrontent et déterminent les équipes championnes, celles qui doivent descendre en division inférieur ou qui ont mérité de monter en division supérieur », fait remarquer Pascal Sawadogo.
La multiplicité des compétitions a aussi tiré le football féminin vers le haut. Hormis les différents championnats, les footballeuses disputent la Coupe du Faso et la dernière-née, la Super coupe. Le développement du football féminin est aussi engendré par le nombre important de filles qui arrivent à parapher un contrat dans des championnats professionnels. Une source de motivation pour les autres filles qui se mettent au séreux dans le football, de l’avis de Adama Ouédraogo, journaliste sportif à la RTB.
Un point de vue partagé par le technicien Pascal Sawadogo, qui apprécie le changement de statut social positif des filles qui arrivent à s’expatrier, et aussi et surtout, le changement de mentalité des parents qui deviennent de moins en moins réticents à laisser leurs enfants jouer au football. « De ce que je sais, celles qui ont pu aller monnayer leur talent ailleurs, ont de très bon salaire allant de 1 million 300 mille à 2 millions FCFA.
Une des joueuses professionnelles est même venue récemment payer une voiture pour ses parents. Ce sont des images qu’il faut promouvoir. Tout le monde ne peut pas réussir à l’école et le football peut être un palliatif. Surtout que sa pratique n’empêche pas les études. Pour peu que l’on soit bien organisé, le football ne remplace pas l’école », se réjouit Pascal Sawadogo. L’effort du ministère des Sports et de la Fédération burkinabè de football à inscrire les filles dans les compétitions sous régionales et africaines permet de booster également le niveau des pratiquantes, constate Pascal Sawadogo.
« Le fait que les filles voyagent pour des compétitions internationales, non seulement ça les forme, les mettent davantage au sérieux mais aussi cela constitue une motivation pour celles qui sont restées au pays à travailler dur », poursuit le sélectionneur des Etalons dames. Zakaria Zèba, lui félicite l’abnégation de certains pionniers, en l’occurrence, Dénis Compaoré, Marguerite Karama, Pascal Sawadogo, Asseta Harvey pour la vulgarisation du football des filles malgré les nombreuses difficultés.
A l’en croire, actuellement, il n’est pas rare de voir certains parents venir eux-mêmes leur confier leurs filles pour qu’elles jouent au football. « Alors que dans le passé, au contraire, ce sont les parents qui étaient réticents», témoigne le directeur technique de section football féminin de l’Union Sportive des Forces Armées.
Du travail reste pourtant à faire

Pascal Sawadogo est convaincu que du travail reste à faire pour que le Burkina puisse devenir un pays de référence en matière du football féminin. « Le nombre d’équipes augmente, mais le nombre de nouvelles joueuses n’évolu pas comme il se doit », regrette le sélectionneur des Etalons dames. Pour lui, il y a un manque important sur le plan de la formation et de la relève.
« Les petites filles qu’on forme, il n’y a pas trop de talent qui émerge. Des filles d’autres pays viennent occuper des places et pourtant, la matière première est en abondance ici. Le nombre de filles dépasse celui des garçons dans les lycées et collèges pourtant », se désole l’entraineur. Une autre difficulté que le coach note, est la rareté des compétitions populaires féminines. « Avec les garçons, on à la chance de détecter un talent dans les compétitions de quartier ou de village. Mais chez les filles, il faut semer, entretenir pour récolter », explique Pascal Sawadogo.
L’évolution du football féminin est perceptible ces dernières années au Burkina, mais le gros défi reste l’engouement du public dans les stades. La raison, selon certains, réside dans la programmation des matchs. « En effet, certaines joueuses vont à l’école le samedi dans la matinée sans oublier que le lundi, elles doivent y retourner. Pour les équipes qui font de longues distances pour aller jouer leur match, il faut nécessairement programmer la rencontre dimanche matin, jour où toute personne peut se permettre une grâce matinée », explique Pascal Sawadogo.
En sa qualité de technicien, Pascal Sawadogo propose aussi une réforme des textes de la fédération afin de faciliter la tâche des clubs. Cela pour permettre aux équipes de pouvoir aligner les U20 en D2, les U17 en D3, même si on peut toujours autoriser de qualifier 5 joueuses de chaque côté. « Il y a des filles d’un certain âge qui ne sont pas permise dans une catégorie donnée, mais pas trop loin.
Si certaines U23 peuvent toujours évoluer avec des U20 surtout pour les équipes de provinces souvent qui sont seules pour la plupart, cela pourrait éviter la perte des talents », argue l’entraineur. Pascal Sawadogo plaide également pour une bourse au niveau des filles, pour leur permettre de subvenir correctement à leur besoin. « La majeure partie des joueuses sont des écolières ou des étudiantes. Avec une bonne source de revenue, elles peuvent se mettre à jour des cours qu’elles ratent, elles peuvent aussi se payer des cours d’appui », proposent-t-il.
Madame Tall, propose une prise en compte du calendrier scolaire dans la programmation des activités sportives, notamment le championnat et la Coupe du Faso pour permettre une participation active des scolaires. Le point focal de l’UFOA-B suggère aussi que la faitière mette l’accent sur la formation. Et pour Zèba Zakaria, tout comme chez les hommes, il faut nécessairement les infrastructures, les équipements, les motivations pour développer le football féminin.
Pengdwendé Achille OUEDRAOGO
