Reprise des transports : « Nous allons saisir cette occasion avec responsabilité », Issoufou Maïga

Les transports en commun reprennent de service ce mardi 5 mai 2020. Dans cette interview, le président de la Faîtière unique des transporteurs routiers du Burkina (FUTRB), Issoufou Maïga, apporte des éclairages.

Sidwaya (S) : Prévus pour démarrer le 4 mai, c’est finalement ce mardi que les transports en commun reprennent. Qu’est-ce qui explique ce report d’une journée?
Issoufou Maïga (I.M.) : Il est vrai que la reprise du transport des voyageurs était prévue pour le lundi 4 mai, mais la proposition n’était pas matérialisée. Lorsque nous avons eu la rencontre le 30 avril avec le ministère en charge des transports, sanctionnée par le protocole d’accord y relatif, il a été effectivement dit qu’on pourrait avoir une probabilité de relance le lundi. C’est-à-dire une semaine avant la rentrée académique. Mais, dans la foulée, nous avons eu le report d’un jour supplémentaire pour respecter le parallélisme de forme lié à la levée de la quarantaine. Car la reprise de l’activité de transport en commun est tributaire forcément de l’abrogation de la quarantaine. D’où la reprise ce mardi matin et nous sommes certains que ce ne sera pas un faux départ.

S : Pensez-vous que ce report est du goût de tous les acteurs ?
I. M. : Nous avons été bloqués pendant plus de 40 jours, et quand nous avons eu vent de la reprise, nous étions très contents. Nous avons connu un jour supplémentaire d’arrêt de travail, mais nous voyons cela comme un décalage visant à mieux faire. De ce fait, il y a eu des amertumes mais nous nous sommes dit que c’est pour le bien-être du pays a priori. Ce n’est pas pour nuire à notre secteur, mais c’est pour une question de protection des populations

S : Des mesures ont été prises à la faveur du protocole d’accord (port du masque, réduction du nombre de places…). Pouvez-vous nous donner l’assurance que ces dispositions seront respectées ?
I. M. : Oui, avec certitude. Nous sommes allés avec une proposition et le gouvernement nous a donné mieux. Comprenez que si vous voulez attraper la main et qu’on vous donne le coude, c’est à vous de savoir exploiter. Je suis confiant et rassuré que les mesures seront le repère des transporteurs voyageurs. Il s’agit, entre autres, de la réduction du nombre de passagers, de la désinfection des cars et des gares, du débarquement rapide, du port du cache-nez et de la fluidité à l’embarquement. Sur ces points, nous sommes obligés d’appliquer ces mesures. Il y va de l’image des transporteurs. Et nous sommes persuadés que les populations seront vigilantes surtout en ce qui concerne la réduction du nombre de passagers qui est de 12% à 15%. Ces mesures sont tenables en ce qui concerne la rentabilité des sociétés. Tout compte fait, il vaut mieux démarrer et continuer les échanges avec le gouvernement sur l’évolution de la pandémie que d’attendre. Donc, c’est une occasion que nous allons saisir avec responsabilité.

S : Tantôt vous avez parlé d’amertume concernant le report des activités de transport. A qui pensez-vous ?
I. M. : Quand vous êtes affamés pendant quarante jours, vous avez l’espoir de reprendre les activités au plus vite. Pour moi, c’est normal qu’il y ait des plaintes de la part des acteurs. Mais, il nous appartient en tant que responsable de leur expliquer le bien-fondé et les conséquences du retard. Le plus préoccupant pour moi, c’est le maintien de la reprise des activités. Si l’on reprend les activités, nous devons prier ensemble pour que la pandémie régresse. J’invite alors les transporteurs et l’ensemble des acteurs à respecter les mesures barrières. J’exhorte aussi les passagers à bord des cars, en cas de manquements, à faire valoir leurs droits en interpellant le personnel ou en contactant l’opérateur de transport, car la santé est l’affaire de tous.

S : Dans le cadre des mesures prises en droite ligne avec le protocole d’accord signé, il y a, entre autres, l’usage du thermo flash pour détecter la température des passagers avant le départ. Qu’est-ce qui est prévu pour un voyageur ayant une température de plus de 37°C ?
I. M. : Le thermo flash n’est pas une obligation. C’est une option pour les compagnies modernes de voyage. S’agissant du secteur informel, il est difficile d’appliquer cette mesure, surtout pour des gares publiques de grande superficie. C’est pourquoi, nous avons préconisé les lave-mains. Pour les cas de température élevée, on peut conseiller le passager à ne pas embarquer ou l’orienter vers un centre de santé. Du reste, je puis vous rassurer qu’il y a des gares qui ont de petits postes sanitaires de premiers secours où nous pouvons isoler les malades et les conduire le plus tôt possible pour une prise en charge.

S : Est-ce que les mesures seront respectées sur le long terme ?
I. M. : Nous avons essayé de sensibiliser les responsables de gares publiques pour le suivi et le maintien des mesures barrières de façon permanente. En conséquence, ils vont travailler à disposer des lave-mains partout, à faire la vérification visuelle du port du cache-nez avant l’embarquement et rendre compte. Il y aura également des superviseurs pour évaluer l’ambiance de la reprise.

S : Au cas où les consignes ne seraient pas respectées, que préconisez-vous?
I. M. : Je connais le niveau d’engagement des acteurs. Je n’ai pas à douter du tout. Ce n’est pas uniquement à Ouagadougou. Je vous assure que j’ai reçu des appels de transporteurs résidant dans des communes pour avoir confirmation de la reprise le 5 mai. Ils m’ont rassuré qu’ils ont lavé leurs véhicules et ont des cache-nez. Certains ont proposé de vendre des cache-nez de réserve aux passagers qui n’en disposent pas. Donc, il y a une anticipation salutaire de la part des transporteurs. En sus, si un transporteur informel d’une commune de plus de 400 km de Ouagadougou m’appelle pour avoir des cache-nez supplémentaires, je répondrai à sa sollicitation. De ce point de vue, je suis optimiste.

S : Ce sont des organisations faîtières de transporteurs qui ont pris part à la signature du protocole de reprise des activités de transport. Les organisations de chauffeurs ne sont-elles pas senties écartées ?
I. M. : Pas du tout ! Les rôles sont partagés. Les chauffeurs ont la maîtrise du camion et le transporteur est l’entrepreneur. Ce sont deux choses différentes. C’est la Faîtière unique des transporteurs routiers du Burkina (FUTRB) qui a engagé des échanges avec le gouvernement depuis le 2 avril pour aboutir à la signature du protocole d’accord le 30 avril 2020. Par conséquent, nous avons anticipé pour dire que nous sommes suffisamment sensibilisés et prêts à reprendre avec les mesures édictées. Avant la reprise, on se retrouvait dans les gares pour échanger. Il n’y a donc pas d’écart entre les transporteurs et les chauffeurs routiers.

S : Après la mise en place de la FUTRB que vous dirigez, une autre faitière est née, le Haut conseil des transporteurs du Burkina Faso (HCT-BF). La guéguerre est-elle derrière vous?
I. M. : Il n’y a jamais eu de guéguerre au sein de la FUTRB. Nous sommes optimistes et prévoyants. Au départ, nous sommes allés sur la base de 19 structures recensées par le ministère des Transports, de la Mobilité urbaine et de la Sécurité routière pour former la FUTRB. Ceux qui n’ont pas pu venir à Bobo-Dioulasso pour l’officialisation de la faîtière ont néanmoins suivi le processus de sa mise en œuvre. A Bobo-Dioulasso, nous étions 15 structures le premier et deuxième jour. Nous avons bénéficié de l’accompagnement du gouvernement en tant qu’observateur. Nous nous sommes également attachés les services d’un huissier qui a suivi la régularité des travaux. Il n’y a pas de guéguerre entre nous et le HCT-BF, au point de ne pas se parler. Du reste, il y a des fondateurs, des adhérents et des dirigeants. Aujourd’hui, les 15 structures peuvent se réclamer membres fondateurs de la FUTRB. Ceux qui n’ont pas pu prendre la marche peuvent nous rejoindre à tout moment. Nous ne comptons pas faire la guerre.

S : Quel appel avez-vous à lancer à la faveur de cette reprise ?
I. M. : Mon premier souhait le plus ardent est qu’ensemble, nous boutons le COVID-19 hors de nos frontières. Nous véhiculons des personnes et sommes censés être des relais entre le Burkina Faso et les autres nations. Mon deuxième souhait est que les populations respectent les mesures barrières.

Entretien réalisé par Boukary
BONKOUNGOU et Wanlé Gérard COULIBALY

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