Cession des actifs miniers de Tambao et de Inata à AFRO TURK : « Nous voulons que les ressources du sous-sol profitent aux Burkinabè », ministre en charge des mines, Simon-Pierre Boussim

Le ministre de l’Energie, des Mines et des Carrières, Simon-Pierre Boussim : « Nous voulons encourager le secteur privé burkinabè à marquer un intérêt particulier pour le secteur minier »

Suite à la polémique née de l’autorisation en Conseil des ministres de la cession des actifs miniers de Tambao et de Inata à la société AFRO TURK, le journal de tous les Burkinabè s’est entretenu avec le ministre en charge des mines, Simon-Pierre Boussim. Dans cette interview, le ministre Boussim rassure que cette autorisation s’est faite conformément à la législation en vigueur et que les intérêts stratégiques de l’Etat burkinabè seront préservés.

Sidwaya (S) : La polémique enfle ces deux jours suite à l’adoption des rapports en Conseil des ministres portant autorisation de cession des actifs miniers de Tambao et de Inata aux sociétés AFRO TURK Tambao et Inata. En tant que premier responsable en charge des mines, pouvez-vous nous situer par rapport à la cession desdites mines ?

Simon-Pierre Boussim (S.P.B) : Je vous remercie pour l’opportunité que vous nous offrez de donner des éclaircissements exprimer sur la question, surtout qu’à l’issue du Conseil des ministres nous n’avons pas eu à nous exprimer. Je voudrais rassurer l’ensemble des Burkinabè et des partenaires que la cession des actifs de l’Etat au niveau de la mine de manganèse de Tambao et d’or d’Inata ne s’est pas faite en contradiction avec la loi. En effet, selon notre document de référence qu’est le code minier, notamment en son article, l’Etat, peut, soit par appel à concurrence ou par entente directe, céder des actifs miniers. Cette disposition du code n’est pas d’ordinaire, car elle prend en compte le caractère stratégique des actifs miniers ; ces actifs stratégiques devraient donc servir les intérêts stratégiques de l’Etat.

Rappelons que l’objet du contrat qui porte sur la cession des actifs miniers de l’Etat s’est fait conformément à l’alinéa 2 de l’article 14 du code minier où les contrats de cession sont valables jusqu’à l’octroi de titres. De ce fait, l’octroi de permis se fera selon la procédure normale de droit commun.

Il faut souligner aussi que le décret portant gestion des titres miniers prévoit en son article premier que l’Etat peut disposer de ces actifs suivant le principe « premier venu, premier servi ». Ledit décret écarte cette option lorsque le titre minier tombe dans l’actif de l’Etat ; et le titre minier tombe dans l’actif de l’Etat lorsqu’il est soit abandonné ou retiré. C’est le cas avec les titres miniers dont nous parlons aujourd’hui, à soir les permis de Tambao et d’Inata qui ont été retirés et donc tombés dans l’actif de l’Etat. L’Etat est donc de disposer conformément aux dispositions du code minier.

S : Que gagne concrètement le Burkina à travers cette cession ?

S.P.B : Nous estimons que la cession de ces actifs va profiter à la nation burkinabè à plusieurs titres. Premièrement, comme je l’ai dit tantôt Inata et Tambao sont deux mines qui sont dans une situation sécuritaire difficile ; et depuis plus de cinq années, ces mines ne sont pas fonctionnelles. Deuxièmement, rien ne nous prouve et nous ne pouvons pas non plus confirmer que ces mines ne sont pas aujourd’hui exploitées par les ennemis de la nation qui se renforcent en termes de ressources pour venir attaquer nos forces de défense et de sécurité. Troisièmement, le gouvernement en cédant les actifs de ces deux mines à des repreneurs qui disposent une certaine capacité, bénéficie de l’assurance que ces mines vont reprendre du service. De ce fait la société qui les reprend va s’impliquer dans la sécurisation de ces zones. Quatrièmement, il faudrait donc dire que la reprise de ces mines va permettre à l’Etat d’avoir des ressources supplémentaires. Cinquièmement, la cession de ces mines ne se fait à titre onéreux et non gratuitement comme on l’a entendu ça et là.

Et mieux, il faudrait aussi dire que la cession s’est faite dans une condition qui permet à l’Etat d’acquérir des moyens stratégiques de surveillance et de combat. Au-delà de tous ces éléments, nous pouvons nous féliciter de pouvoir faire confiance à un partenaire qui puisse nous aider dans la sécurisation de cette zone.

S : Concrètement quelles sont les ressources prévisionnelles que l’Etat peut engranger avec cette cession ?

S.P.B : Pour ce qui est des ressources prévisionnelles que l’Etat peut engranger avec cette cession, y a d’abord la vente par entente directe qui constitue donc des subsides pour l’Etat. Et ensuite, nous pouvons ajouter que, lorsque ces mines vont entrer en exploitation, elles vont payer des royalties, des taxes et redevances, des dividendes, bref tout ce que la règlementation prévoit sera respecté.

En plus de cela, il y a des fonds miniers qui constituent les ressources pour les collectivités. Sans oublier la construction des infrastructures de développement, surtout au niveau de Tambao où des infrastructures critiques vont être réalisées pour faciliter l’exploitation de la mine. Toutes ces dispositions vont permettre à l’Etat d’avoir beaucoup plus de ressources.

S : La société Afro Turk a-t-elle la capacité de gérer ces dites mines d’autant plus que d’aucuns pensent qu’elle est immatriculée au Togo et limitée en termes de moyens ?

S.P.B : C’est une très belle question, car il nous est revenu que la société Afro Turk est d’origine togolaise, avec un capital d’un million de franc CFA. Laissez-moi vous dire que jusqu’à preuve de contraire, nous n’avons attribué aucune mine à une société togolaise. Mais, si une société togolaise a une filiale de droit burkinabè et que cette filiale demande un titre minier, nous allons analyser la demande et regarder si elle respecte les dispositions du code minier et de ses textes d’application. Si cela est fait, nous sommes en droit de l’octroyer.

Mais ce que je peux vous dire sur Afro Turk, est qu’elle est une société de droit turque qui est donc inscrite au RCCM/Istanbul sur le numéro 4213975. Afro Turk Inata et Afro Turk Tambao sont donc des filiales de cette société régulièrement immatriculée au Burkina Faso sous la forme d’une société anonyme.

Elle présente des garanties nécessaires pour mener à bon port le partenariat avec l’Etat burkinabè. Au demeurant, les capacités techniques et financières sont des éléments qui font partie intégrante du processus d’octroi de titre minier. La Commission nationale des mines va statuer sur ces questions et aviser. Le statut de SA ou SARL ne préjuge pas forcement des capacités techniques et financières d’une société à pouvoir opérer. Nous avons été tout dernièrement au PDAC où nous avons vu par exemple qu’il y a des sociétés SARL qui sont des équipementiers dans l’exploitation minière. Quand vous prenez un Caterpillar, vous vous imaginez combien ça peut couter par rapport au capital d’une SARL. A titre d’exemple, lors du conseil des ministres passé, nous avons pu octroyer un titre minier à une SARL, notamment à Sana Gold, au niveau de Soudigui. Autrement, on ne devrait pas présager que le fait d’être une SARL ou une SA suffit ou ne suffit pas pour avoir ces capacités.

S : Les mines de Tambao et d’Inata étant situées dans des zones à risque au regard de la situation sécuritaire actuelle, pensez-vous que cette société pourra mener à terme ces projets ?

S.P.B : Il faut dire qu’au-delà des mines de Tambao et d’Inata, le gouvernement de la Transition est dans un processus de dynamisation de la sécurisation de tous les sites miniers du Burkina Faso ; pour, d’une part, assécher les sources de financements des terroristes, et, d’autre part, assurer des entrées de ressources pour le développement socioéconomique de notre pays. Nous avons reçu un engagement de AFRO TURK à mutualiser les efforts          avec le gouvernement pour sécuriser ces deux sites. Aussi, nous n’avons aucune raison de douter de la bonne foi de notre partenaire ; il est prévu dans les contrats de cession la construction d’une base militaire à Tambao et Inata avec le concours matériel et financier du partenaire. Nous doutons donc pas de la société mais puisse nous aider à sécuriser ces sites et à mener à bien ses activités.

S : Certaines personnes pensent que la société AFRO TURK est sous la couverture d’un burkinabè qu’en est-il exactement ?

S.P.B : La vision actuelle du Burkina est d’encourager les nationaux à investir dans l’exploitation minière et à prendre des actifs pour contribuer au développement socioéconomique du pays. Quand nous n’arrivons pas à le faire directement, nous avons initié le contenu local pour permettre aux burkinabè de toujours d’être présents dans ce secteur. Que des nationaux prennent des parts dans les sociétés AFRO TURK à qui le gouvernement burkinabè vient d’accorder sa confiance pour l’exploitation des mines d’or d’Inata et de manganèse de Tambao, nous parait une bonne chose si cela est avéré.

Je saisis cette occasion pour encourager les burkinabè à marquer un intérêt particulier au domaine minier notamment en invertissant et apportant davantage des ressources pour que nous puissions effectivement aux Burkinabè de profiter de ces mines. Comme c’est le crédo du gouvernement de la Transition, nous voulons que les ressources du sous-sol burkinabè profitent aux Burkinabè.

Et tous les Burkinabè sont engagés dans cette dynamique. Il est évident que les reformes que nous engageons ne seront pas bien accueillies dans ces certains milieux. Il y a des es remous sociaux auxquels nous faisons face, mais nous savons à quoi nous nous engageons et nous croyons tenir le bon bout. Je vais remercier les médias que vous êtes d’être venus à la source de l’information. Cela nous permet de vous donner la bonne information et aux citoyens burkinabè et les rassurer que rien n’est bradé au Burkina et que rien ne fera à leur insu.

Interview réalisée par

Mahamadi SEBOGO

Windmad76@gmail.com

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