Après le coup d’Etat du 24 janvier 2022, les Burkinabè attendaient l’adresse du président du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR), le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, pour être situés sur les motifs de l’irruption de l’armée dans les affaires de l’Etat. Ce discours est intervenu, le jeudi 27 janvier 2022, trois jours après la prise du pouvoir par le MPSR. Sur la forme, il y a longtemps qu’un militaire, en tant que chef de l’Etat, s’est adressé aux Burkinabè en tenue Terre du Burkina, le béret rouge des Forces armées vissé sur la tête. Sur le temps du discours, on a noté quinze minutes. Une prouesse ? Pourquoi pas ? Surtout qu’il s’agissait de faire un round up d’une situation nationale assez complexe. Le rendu également force l’admiration.
Avec élégance et facilité mais d’un ton solennel et ferme, le président du MPSR s’est adressé à la fois au peuple burkinabè, aux amis du Burkina Faso et aux organisations régionales et sous régionales. Le fort emploi du pronom personnel « je » (il l’a utilisé au moins douze fois) est assez caractéristique de l’engagement personnel du président Damiba. Il y a le « je » mais aussi le « nous », personnel pluriel comme pour dire qu’il n’est pas seul. Il y a aussi ses frères d’armes avec lesquels il a pris le pouvoir. Le président du MPSR a bien utilisé le rétroviseur, notre passé lointain ou proche, pour trouver les raisons qui ont conditionné l’intervention des Forces de défense et de sécurité (FDS) dans les affaires de l’Etat et par conséquent, le renversement du régime de Roch Kaboré.
Il y a surtout, cet ennemi commun auquel notre pays fait face depuis six ans : le terrorisme. Le lieutenant-colonel Damiba a une pensée forte à l’endroit de toutes les victimes du terrorisme. Il l’a dit clairement, l’avènement du MPSR a été imposé par le cours des évènements dans notre pays fragilisé par tant d’évènements et essaimé de toutes parts par des groupes armés radicaux. L’ambition du MPSR, a-t-il dit, est de « fédérer l’ensemble des énergies de notre pays pour jeter les bases d’un Burkina Faso nouveau, débarrassé des oripeaux d’une gestion politique aux antipodes des nouvelles aspirations de notre peuple. Notre agenda est unique et il est clair : la sauvegarde de notre peuple et la refondation de notre Nation ».
La réconciliation est en pole position des priorités des nouvelles autorités, qui ont entamé des concertations avec les différentes composantes de la Nation, y compris avec les personnalités du régime sortant, afin de dégager les grandes lignes qui conduiront à des décisions consensuelles et inclusives pour la refondation et la restauration d’une paix durable. Au passage, il a interpellé, sinon, mis en garde tous ceux qui ne seront guidés que par leurs intérêts égoïstes envers qui, il sera « intraitable ». Le leader du MPSR en s’adressant au peuple burkinabè confesse que la tâche qui nous attend est immense. La réconciliation, surtout la sécurité, nœud gordien qui brise le rêve burkinabè depuis maintenant six ans et qui était en train d’engendrer une rupture de confiance entre les FDS et le peuple, sera au cœur de l’engagement du MPSR. Le chef de l’Etat a appelé les FDS et les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) à se mettre en ordre de marche pour la reconquête de notre territoire. C’est donc un premier discours d’engagement à prendre les décisions avec le peuple. Le fin mot est bien la volonté affirmée du retour à l’Etat de droit. Pour éviter les erreurs du passé, le président Damiba, qui s’engage à un retour à une vie constitutionnelle normale, le fera « dès que les conditions seront réunies selon les échéances que notre peuple aura souverainement définies ».
Le lieutenant-colonel Damiba s’est adressé également à la communauté internationale. Certainement aux organisations sous régionales, promptes à exercer une pression sur tout régime inconstitutionnel. Aux amis du Burkina, il demande un accompagnement pour pouvoir revenir à cette vie constitutionnelle normale. La justice et les droits humains seront respectés, a-t-il d’ores et déjà promis. Tous les procès en cours ne verront aucune immixtion du politique, a-t-il aussi rassuré. Conscient que tous ces engagements ne peuvent être tenus sans l’adhésion des Burkinabè, il a prévenu que chaque citoyen devra faire preuve de courage, de désintéressement et de détermination.
Mahamadi TIEGNA
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