Apiculture au Burkina : une filière en pleine croissance

Des femmes prêtes à aller au front !

La filière apicole est en pleine croissance au Burkina Faso. De 1 300 tonnes en 2021, la production du miel est passée à plus de 1 500 tonnes en 2022. On dénombre aujourd’hui plus de 20 000 apiculteurs qui tirent profit de ce secteur.

L’apiculture mobilise de plus en plus d’acteurs au Burkina Faso. Bien qu’elle demeure une activité secondaire pour la plupart d’entre eux, elle est une source de revenus non négligeable. A titre indicatif et selon un rapport du ministère en charge des ressources animales, datant de 2019, le pays compte 16 261 apiculteurs dont 5 802 évoluant individuellement et 10 459 au sein de 217 structures associatives. Seulement 4,1%, qui n’évoluent pas au sein d’une structure associative, pratiquent l’apiculture comme une activité principale.

Dans la plupart des cas, l’apiculture est une activité secondaire. Mais le Salon national du miel (SANAM) veut changer la donne. Considéré comme la vitrine du miel au Burkina Faso, le SANAM dont la IIIe édition s’est tenue du 24 au 27 novembre 2022 à Ouagadougou, vise la promotion des produits de la ruche en renforçant la visibilité et l’attractivité autour de la filière. C’est un tremplin pour des acteurs. Tout ce qui a trait à l’abeille semble intéressant et est source de revenus. Du liquide précieux (le miel) aux produits dérivés en passant par les équipements… Il n’y a pas que le miel qu’on tire de la ruche.

Les dérivés comme la propolis, la gelée royale, le pollen… sont reconnus pour leur grande valeur énergétique. Ils sont aussi utilisés à des fins thérapeutiques. Ils sont autant prisés que l’élément principal. Quant à la cire, un sous-produit du miel, elle est utilisée dans la fabrication de la bougie, du savon, des pommades… En 2019, 16,4% des apicultures étaient des fournisseurs de cire.

Source de revenus

Des abeilles en pleine activité.

Il ne fait aucun doute que le miel est un produit qui rapporte. Ce n’est pas Abdou Razack Ky qui dira le contraire. Il est désigné meilleur producteur de miel de l’année 2022 à la dernière édition du SANAM. Il exerce dans les régions des Hauts-Bassins et des Cascades. « Je produis par an 3 tonnes de miel qui génèrent une recette de 12 millions F CFA », déclare-t-il. Le lauréat dit mener cette activité depuis 2014 qu’il a apprise de son père.

« Je fais partie de la Société coopérative apicole Bengadi qui regroupe une soixantaine de membres. Nous possédons 1 500 ruches qui nous procurent 20 tonnes de miel annuellement », poursuit-t-il. A l’écouter, une ruche peut produire 8 à 10 litres de miel par saison. Razack Ky tire profit de l’exploitation des dérivés du miel et partage ses connaissances en dispensant des formations.

Parmi les apprenants figurent des femmes dont il dit être impressionné. «Elles s’en sortent bien, car elles arrivent à dompter leur peur», foi de M. Ky. Apisavana est une structure qui se distingue dans la transformation du miel et de ses dérivés. Elle a été le meilleur exportateur de l’année 2022 au SANAM. En effet, selon la représentante commerciale de l’entreprise, Marceline kansiemo, leur production annuelle en brut a atteint 200 tonnes. La transformation du miel semble ne pas avoir de secret pour eux.

Vin, liqueur, jus et savon sont quelques-uns des produits vendus. L’agent commercial confie que le miel de fleurs est le plus prisé au Burkina. A l’extérieur, c’est le mono fait à base de mangue, de l’anacarde et de l’eucalyptus. Au-delà de la production, cette maison propose des équipements et du matériel apicoles.

Des innovations

Ici, une ruche traditionnelle…

Konfyam est également une structure qui innove dans le conditionnement du miel à travers son produit Lino. C’est du miel mille fleurs conditionné en sticks de 20g empaquetés par dizaines. Le stick coûte 2 000 F CFA. Bernard Kéré assure la qualité du produit dont le raffinage se fait sans additif. « Le miel est recueilli à froid, raffiné et emballé dans les sticks pour faciliter l’usage. Notre objectif est d’aider les Burkinabè à consommer des produits du terroir, de bonne qualité», indique-t-il.

Lino vient d’être mis sur le marché en juin dernier. Konfyam, à en croire M. Kéré, compte dans les jours à venir produire le miel de moringa, au goût de citron, de tamarin et de gingembre. Les innovations autour des équipements pour l’apiculture ne cessent de croître également. La dernière en date est la découverte de la ruche connectée au téléphone. C’est une œuvre du Centre d’agro-conseils installé à Kamboinsin et qui est actif dans la production du miel, la fabrication du matériel, la formation et appui en conseils.

« Nous avons installé des capteurs qui vont permettre d’envoyer des informations sur les mouvements des abeilles, la production du miel, la date propice pour la récolte et les problèmes de la ruche vers le téléphone», informe Eddie Roland Compaoré. A l’entendre, c’est un projet qui remonte à 2020 et peut être considéré comme une solution aux problèmes de rendement et de vol de ruches. Pour bénéficier de cet outil, il faut une ruche, l’application et un abonnement. En effet, la ruche est un dispositif de base.

En 2019, on a dénombré environ 132 000 ruches dont 82,3% sont traditionnelles (construites à base de matériaux locaux, à savoir la paille, les troncs d’arbres, la poterie…) et 17,7% modernes. Pour la récolte et la transformation, on a besoin de la tenue de protection (gants et bottes), de la ruche et son support, de l’enfumoir, de seaux de récolte et de brosses. Selon Sidiki Coulibaly, responsable de la ruche Doubakoro, il faut avoir de la végétation aux alentours pour faire un rucher. Sur une superficie de 9 m2, il dit pouvoir installer une trentaine de ruches. A entendre Ibrahim Traoré du centre apicole Djiguiya, les endroits propices sont les espaces boiseux où on trouve le tamarinier, le raisin, les lianes, etc.

Les difficultés

…et une ruche moderne.

« L’apiculture est un travail minutieux. Seuls le savoir-faire et les bonnes pratiques permettent d’obtenir un miel de qualité », affirme M. Coulibaly. Pour lui, si ce n’est pas le cas, survient un autre problème qui est de faire du faux miel. «Je qualifie de faux miel, tout miel mal récolté, mal conditionné. Il perd ses éléments nutritifs. Ceux qui ne peuvent pas s’octroyer des ruches font un mélange avec le sucre», s’indigne M. Coulibaly.

Un acte à bannir et il pense par ailleurs qu’il faut une modération dans la consommation du sucre au profit du miel qui est naturel. Il reste toutefois confiant car, dit-il, l’interprofession du miel et le comité permanent de l’apiculture sont en train de travailler pour recadrer les brebis galeuses. D’autres difficultés dont les apiculteurs craignent sont l’utilisation de pesticides, la pollution de l’environnement, la déforestation et le changement climatique. Ils sont les principales menaces à l’abondance, à la diversité et à la santé des abeilles.

Abdou Razack Ky relève que l’insécurité et la cherté du matériel apicole sont des goulots d’étranglement du secteur. « Dans les Cascades par exemple, nous avons abandonné des sites à Mangodara à cause de l’insécurité. C’est un manque à gagner», regrette-t-il. Sur la cherté du matériel, il annonce par exemple que la ruche kenyane est à 35 000 F CFA, la tenue à 30 000 F CFA, les bottes à 10 000 F CFA et les gants à 5 000 F CFA.

Habibata WARA


20 mai, Journée mondiale de l’abeille

L’ONU a proclamé le 20 mai Journée mondiale de l’abeille précisément pour encourager les gouvernements, les organisations, la société civile et les citoyens concernés à protéger les pollinisateurs et leurs habitats. Les abeilles et les autres pollinisateurs, tels que les papillons, les chauves-souris et les colibris, sont de plus en plus menacés par les activités humaines.

La pollinisation est cependant un processus fondamental pour la survie des écosystèmes. Car, la reproduction de près de 90 % des plantes sauvages à fleurs du monde dépend d’elle, ainsi que 75 % des cultures vivrières et 35 % des terres agricoles à l’échelle de la planète. Non seulement les pollinisateurs contribuent directement à la sécurité alimentaire, mais ils constituent aussi des leviers essentiels pour la conservation de la biodiversité.

Pour attirer l’attention de tous sur le rôle clé que jouent les pollinisateurs, les menaces auxquelles ils sont confrontés et sur leur importante contribution au développement durable, les Nations unies ont décidé de . Cette journée veut aussi encourager un renforcement des mesures de protection des abeilles et des autres pollinisateurs, qui peuvent contribuer de manière significative à la résolution des problèmes liés à l’approvisionnement alimentaire mondial, notamment dans les pays en développement.

Nous dépendons tous des pollinisateurs et il est donc crucial de surveiller leur déclin et de freiner la perte de la biodiversité et la dégradation des écosystèmes. Les pollinisateurs ont un taux d’extinction qui est aujourd’hui de 100 à 1 000 fois plus élevé que la normale. Environ 35 % des pollinisateurs invertébrés, en particulier les abeilles et les papillons et environ 17 % des pollinisateurs vertébrés, tels que les chauves-souris, sont aujourd’hui menacés d’extinction. Si cette tendance se poursuit, les cultures nutritives telles que les fruits, les noix et autres légumes se verront remplacées par des cultures vivrières comme le riz, le maïs et les pommes de terre, favorisant ainsi des régimes alimentaires déséquilibrés.

Source : Nations unies