Périmètre aménagé de Soum: un espoir pour la région du Centre-Ouest

Des machines à pied d’œuvre pour terminer les aménagements à Soum.

D’une capacité de 155 millions de m3 d’eau, le barrage de Soum suscite de l’admiration dans la région du Centre-Ouest. Avec ce potentiel, il permettra d’irriguer un périmètre aménagé de plus de 1 000 hectares. Sur le terrain, riziculteurs et maraichers sont à l’œuvre en vue d’atteindre les objectifs de l’offensive agropastorale et halieutique 2023-2025.

Au pied de la digue du barrage, ce 14 février 2024, des bulldozers vrombissent. Ils sont en pleins travaux d’aménagement du périmètre irrigué du village de Soum, dans la commune de Nanoro, région du Centre-Ouest. A un jet de pierre de là, des producteurs s’activent dans leurs parcelles. Tous semblent engager une course contre la montre. En aval de l’ouvrage hydraulique, réalisé en 2010 et dont la capacité de stockage est de plus de 150 millions de mètres cubes d’eau, une plaine de plus de 1 000 hectares (ha) s’étale.

Elle est destinée à la production de riz dont 140 ha sont réservés à la culture maraîchère. A la faveur de l’offensive agropastorale et halieutique 2023-2025, le ministère en charge de l’agriculture veut faire de ce site une référence en termes de production rizicole, maraîchère et piscicole de la région. A entendre le Directeur régional (DR) de l’Agriculture, des Ressources animales et halieutiques du Centre-Ouest, Edouard Ilboudo, plus de 500 ha de riz seront emblavés sur ce périmètre pour la campagne sèche 2024, avec une production attendue de plus de 2 000 tonnes.

Les producteurs ont entamé ladite campagne il y a de cela un mois. Certains sont aux semis et d’autres encore au labour. Ce mercredi matin du 14 février, Souleymane Kaboré n’a pas le temps à perdre. Dans sa parcelle de 0,5 ha, il multiplie les coups de pioche pour la préparer aux semis. Mais avant, il a fallu mouiller le sol pour faciliter le travail. Toute la famille, femmes et enfants, est à l’ouvrage. Aux dires de M. Kaboré, c’est l’insuffisance des motoculteurs qui les a contraints à creuser à la main. Un travail harassant, selon lui. Il est à sa troisième année de production et déjà, il avance des motifs de satisfaction. « Avec ce périmètre, j’arrive à satisfaire aux besoins de consommation de ma famille », se réjouit-il.

Des producteurs engagés

Souleymane Kaboré et sa famille en pleins travaux dans leur parcelle de production rizicole.

Tout comme lui, son voisin Rasmané Kaboré utilise la force de ses bras pour préparer sa parcelle de production. Il pense qu’attendre son tour de labour avec les motoculteurs lui fera perdre du temps. Dans sa coopérative, mentionne-t-il, il y a plus d’une centaine de membres qui comptent sur quatre motoculteurs. Un peu plus loin, d’autres producteurs se démènent sous le soleil cuisant pour semer leur riz. Pendant ce temps, des jeunes labourent ou concassent la terre dans d’autres parcelles à l’aide de motoculteurs.

Nabyouré Sawadogo s’impatiente dans son champ qui n’est toujours pas labouré.
Après s’être allée aux nouvelles auprès des machinistes, elle repart un peu affligée. « Les années passées, le labour de ma parcelle d’un demi-hectare coûtait 30 000 F CFA. Je payais une avance de 7 500 F CFA et le reste à la fin des récoltes. Mais à ma grande surprise, on dit que je dois débourser 25 000 F CFA cash cette année », explique la sexagénaire. L’insuffisance d’engrais et d’eau fait aussi partie de ses soucis.

C’est également la préoccupation soulevée par Sidbéwendé Pierre Guigmdé, un autre riziculteur, qui déplore l’étroitesse de certains canaux secondaires et tertiaires. « Malgré le fait que l’on irrigue les parcelles à tour de rôle, je peux rester du matin jusqu’à 23h sans pouvoir avoir l’eau sur mon terrain », fait-il savoir. Pour sa part, le trésorier de la coopérative Nongtaaba, Somyassa Sankara, estime que l’aménagement comporte des défaillances.

Outre l’exiguïté des canaux d’irrigation, il note que certaines parcelles sont mal nivelées. Toutefois, soutient-il, cela ne peut entamer la détermination des producteurs à contribuer à l’atteinte de la sécurité alimentaire. A l’écouter, les producteurs ont été davantage galvanisés par la visite du ministre en charge de l’agriculture, le commandant Ismaël Sombié, en novembre 2023 à Soum. « Nous lui avons posé nos doléances sur le manque de matériel et il nous a fait venir 30 motoculteurs que nous avons répartis entre les coopératives.

Nongtaaba en a reçu quatre et une bineuse », détaille M. Sankara. De quoi soulager les riziculteurs mais les besoins demeurent, selon lui. Car, de son avis, quatre motoculteurs pour une centaine de producteurs s’avèrent insuffisants et cela rend difficile le respect du calendrier cultural. Le conseiller agricole Louis Honoré Nombré fait partie de l’équipe d’encadrement installée sur le site par le Projet de développement hydro-agricole (PDH) de Soum. Il indique que les aménagements sont toujours en cours sur la rive droite du barrage et les parcelles sont attribuées au fur et à mesure.

C’est pourquoi, justifie-t-il, on ne peut pas ouvrir les vannes à fond, au risque d’avoir des pertes d’eau. Il déplore aussi le fait que les producteurs ne respectent pas les tours d’eau fixés pour faciliter l’irrigation. « Tout le monde veut irriguer sa parcelle au même moment, alors que c’est règlementé. Les canaux tertiaires n’ont qu’un débit de 15 litres par seconde », déclare le conseiller agricole. Selon le DR Edouard Ilboudo, le PDH de Soum qui a aménagé le site a mis l’accent sur la production du riz qui se fera sur 1 008 ha et le maraîchage sur 140 ha. A cet effet, sur les huit coopératives, sept vont s’investir exclusivement dans la riziculture et une dans la maraîcher-culture. Les variétés de riz promues sont la TS2 et Orylux.

Des attributaires de parcelles interpellés

Somyassa Sankara, trésorier de la coopérative Nongtaaba des producteurs de riz de Soum : « le pays est en guerre et notre contribution, c’est de travailler à assurer la sécurité alimentaire ».

Au côté nord de l’ouvrage hydraulique, les producteurs maraîchers sont à la tâche. Des champs de tomates et d’oignon s’étendent. Ici également, le problème d’eau se pose. Par endroits, le stress hydrique se constate sur les cultures. Aux dires des maraîchers, certains canaux qui sont souterrains sont obstrués et les stations de pompage ne sont pas toutes fonctionnelles. A proximité du site maraîcher, des techniciens sont en travaux de réparation dans une des sept stations de pompage installées sur le périmètre aménagé de Soum.

En attendant, ce sont des motopompes qui sont utilisées pour convoyer l’eau dans les parcelles dont les superficies varient entre 0,25 et 0,50 ha. « Les motopompes tombent fréquemment en panne et cela joue négativement sur nos rendements », déplore la productrice maraîchère, Kélounkoué Kazongo. Pour le président de la coopérative Bénéwendé des maraîchers de Soum, Bassolma Bassan Victor Bayili, ces petits soucis font que les activités ne tournent pas encore à plein régime.

Les spéculations phares sont l’oignon et la tomate et dans les prévisions de l’offensive agricole, informe-t-il, les membres de cette coopérative, au nombre de 321 dont 102 femmes, doivent produire trois fois dans l’année. Leur souhait est que le marché soit organisé afin que leurs produits ne soient plus bradés. Par rapport aux défaillances constatées sur les aménagements, le DR en charge de l’agriculture du Centre-Ouest rassure qu’elles seront corrigées progressivement.

Puisque, rappelle-t-il, l’entreprise attributaire du marché est toujours sur le site pour terminer et parfaire les travaux. Toutefois, Edouard Ilboudo invite les attributaires de parcelles non encore mises en valeur à les exploiter au risque de les voir retirer momentanément pour la production. Car, souligne-t-il, beaucoup de demandeurs se bousculent toujours aux portes du PDH de Soum.

Mady KABRE
dykabre@yahoo.fr