Il est la plaque tournante de Salitas. Expérimenté dans le management des joueurs avec un bon carnet d’adresses, Boureima Maïga est l’un de ceux qui a contribué à la qualification historique d’une équipe burkinabè en phase de poules d’une coupe d’Afrique interclubs. Dans l’entretien, il dresse le bilan de la participation de Salitas en Coupe de la CAF et aborde les perspectives.

Que retenez-vous de cette première participation de Salitas à la phase de poules de la coupe CAF ?
Déjà pour une première participation, les enfants ont beaucoup appris de cette campagne. Depuis les éliminatoires jusqu’à la phase de poules, ils ont disputé 12 matchs, avec 6 voyages. Je peux dire qu’ils ont eu une très grande expérience au niveau international. Ce qui est satisfaisant. Ma satisfaction est encore plus grande parce que Salitas vient d’être classé parmi les 100 meilleurs clubs de l’Afrique au bout de sa première participation. Le mérite revient au staff technique et aux joueurs. L’encadrement a fait un grand boulot, même s’il reste encore beaucoup à faire.

Quels sont les enseignements que Salitas tire de cette campagne ?
Le premier match nous a coûté cher. C’est ce match qui a été à la base de notre élimination. Mais il nous a permis d’apprendre beaucoup de choses. Nous savons maintenant comment jouer à l’extérieur. Si vous avez remarqué, après ce déplacement difficile, le tir a été rectifié et le ministère des Sports et des Loisirs a pris les choses en main pour les autres voyages. Et la préparation de nos déplacements a été impeccable. Je vous promets que ce qui nous est arrivé au Nigéria ne va plus jamais se répéter avec un club burkinabè. Dans l’ensemble, nous avons joué 3 matchs à domicile sans la moindre victoire avec seulement un but marqué. Cette inefficacité nous a coûté cher. Cela peut s’expliquer à cause du niveau de la compétition car, durant notre préparation, nous avons marqué 8 buts en 3 matchs. Je le répète, notre participation à cette compétition nous a permis de tirer des enseignements et je vous assure que nous ne sommes pas loin de concurrencer tous ces grands clubs.

Comment expliquez-vous que votre équipe ne soit pas parvenue à faire la différence à domicile ?
Je pense que c’est la pression de la compétition. Les joueurs ne sont pas habitués à gérer cette pression. Ils ne jouaient plus pour Salitas, mais pour tout le pays. Il y a des joueurs qu’on sentait stressés à la veille des matchs. Ils avaient envie de bien faire. C’est dommage qu’après cette campagne, aucun joueur de Salitas n’ait pas été sélectionné en l’équipe nationale.

Ayant déjà pris goût à la phase de poules de la coupe d’Afrique interclubs, il est clair que l’objectif la saison prochaine sera encore le même parcours…
Ce groupe n’est déjà pas mal. Si Dieu fait que nous sommes champions, nous aurons encore un autre défi. Il s’agit d’accéder aux matchs de poules de la Ligue des champions. Pour cela, nous allons encore nous renforcer avec les meilleurs burkinabè comme ce que nous avions fait cette saison. On avait seulement 2 étrangers qui n’étaient d’ailleurs pas des titulaires. Nous allons bien nous renforcer pour pouvoir représenter encore valablement le pays comme une équipe nationale.

Forcément que l’effectif sera chamboulé?
Il y aura probablement des départs. Mais, je peux vous dire qu’ils seront remplacés valablement. Si vous vous rappelez, après notre sacre en coupe du Faso, il y a eu 8 joueurs qui sont partis. Tout le monde se demandait comment nous allons pouvoir remplacer cette belle équipe. La suite, vous l’avez vu. Nous avons essayé de recruter judicieusement pour parvenir à notre objectif qui était d’intégrer la phase de poules.

L’argent de la CAF est-il rentré ?
L’argent de la Confédération africaine de football (CAF) est rentré de moitié. C’est-à-dire que nous avons reçu, il y a un mois de cela, 50% du montant dû. Les gens oublient que la CAF prend la moitié pour les droits de télé. Chaque diffusion fait 54 000 dollars (environ 27 millions FCFA) qu’elle soustrait de notre argent. Nous devons engranger 250 000 dollars (environ 125 millions FCFA) dans la totalité mais la moitié repartira à la CAF. C’est pour cela que je trouve que la CAF ne devrait pas parler de 250 000 dollars mais plutôt 150 000 dollars (75 millions de FCFA) si l’on sait qu’elle retient la moitié de la somme annoncée.

Les primes de matchs des joueurs ont-elles été payées ?
Les joueurs ont été payés. Les primes de matchs ont été réglées. Je veux parler surtout du million cinq cent mille francs CFA que le président du club leur avait promis après la qualification pour la phase de groupes. Cette promesse a été réglée par tranche. Notamment 250 000 FCFA lors du match face à Al Masry, le même montant face à Al Nasr. Après la qualification, les joueurs, par l’intermédiaire de leur doyen, Daouda Diakité, ont demandé une avance. Cela a été fait parce qu’il n’y avait pas de prime de match mais plutôt la prime de qualification qui était le million cinq cent mille francs. Nous leur devons maintenant 200 000 FCFA sur la promesse du colonel Yacouba Ouédraogo après le match. J’ai la preuve avec moi et chaque joueur peut témoigner. On avait même promis un million en cas de qualification pour les quarts de finale.

Quelque chose vous est resté dans le cœur ?
Je remercie toutes les personnes qui nous ont soutenus durant cette campagne. Je remercie les entraîneurs, la direction technique nationale qui nous a beaucoup soutenus. Mais, ce qui m’a le plus touché, c’est la solidarité des autres clubs du pays. Quand je voyais les drapeaux d’autres clubs comme l’EFO, l’AS- Douanes, l’ASFA-Y, l’USO etc., je m’en revenais pas. Nous sommes des concurrents dans le championnat national mais en campagne africaine, nous sommes unis. Je voulais par contre dire que la Fédération pouvait nous faire accompagner par un membre de la direction technique nationale. Par exemple Firmin Sanou ou Narcisse Yaméogo ; par rapport à leur vécu, ils pouvaient nous être associés. Elle pouvait nous trouver également un entraîneur expérimenté afin qu’il suive l’équipe dans sa préparation, ne serait- ce que par ses conseils comme cela se fait quand l’équipe nationale joue. Cela n’a pas été fait. Je ne critique pas. C’est une doléance pour les autres équipes qui vont sortir prochainement en campagne africaine. Nous n’avons pas non plus vu le ministère, ni la fédération au moment le plus important de qualification. Ils devaient venir nous soutenir comme ils le font quand les Etalons sont au vert. Le comportement avec l’équipe nationale doit être le même quand il s’agit d’une équipe en phase de poules d’une campagne parce qu’elle représente aussi les couleurs nationales.
J’ai également été très déçu par les anciens joueurs burkinabè. Leur rôle devrait être de transmettre ce qu’ils ont appris à la jeunesse. Mais on ne les a pas vus durant toute la campagne. Nous n’avons pas vu un ancien footballeur venir nous apporter son soutien. Or ce soutien, nous l’avons reçu de certains entraîneurs. Je m’excuse d’oublier certains mais des techniciens comme Moussa Sanogo dit Falcao ou Piouhouri Wéboanga nous ont toujours appelés pour nous prodiguer des conseils. Mais les anciens footballeurs, qui ont deux associations que sont les anciens footballeurs et les anciens internationaux, n’ont pas pensé venir nous soutenir. Cela reste ma très grande déception. Ce que les enfants ont fait, personne n’a réalisé cette performance au Burkina Faso. Leur soutien moral allait certainement permettre aux enfants de se surpasser. Et jusqu’à présent, je ne les ai pas vus. Je les informe que quand un club est en campagne africaine, il a plus besoin des anciens footballeurs que tout autre. Si par exemple un ancien venait nous dire de faire attention à notre déplacement du Nigéria parce qu’il a déjà vécu une telle expérience, cela allait nous permettre d’éviter certaines désagréments. Je suis un ancien joueur je fais partie d’eux. Mais, je n’ai pas voulu les rappeler qu’ils devaient passer voir les jeunes. Je voulais que la décision vienne d’eux parce que c’est leur devoir de le faire. Ce n’est pas la peine de créer des associations qui ne se soucient pas d’accompagner les jeunes du Faso foot. Pourtant, ils sont allés soutenir les Etalons. Qui fait les Etalons ? Ce sont les équipes. Tous ceux qui jouent avec l’équipe nationale sont passés dans les clubs. Pour vous dire qu’ils ne devaient pas faire la différence entre les Etalons et ces jeunes. Bref, je remercie ces jeunes qui ont montré qu’au Burkina Faso, il y a du talent. Je remercie le président du club qui a accordé une prime historique aux joueurs. Aucun club burkinabè n’a donné une telle prime à ses joueurs. Désormais, les clubs sont avertis que le colonel Yacouba Ouédraogo a mis la barre très haut. Je remercie enfin le jeune entraîneur Ambass Ouédraogo ainsi que Ladji Coulibaly pour le travail qu’ils ont abattu. Ils ont écouté les conseils des autres pour arriver à ce niveau de la compétition. Ils ont beaucoup progressé au fil des matchs. Et je me suis réjoui d’entendre Roger Lemerre dire que tactiquement Salitas avait la meilleure équipe. L’ancien capitaine de l’équipe nationale de la Hollande a dit que c’est très difficile de gagner Salitas. Cela est une grande victoire pour moi parce que je me rappelle que j’ai essuyé pas mal de critiques à cause de mes entraîneurs. Beaucoup avaient avancé qu’ils n’auraient pas le niveau et ils ont prouvé le contraire. Je salue l’ensemble de la presse qui n’a ménagé aucun effort pour nous accompagner. Elle a poussé l’équipe jusqu’à la qualification.

Entretien réalisé par
Yves OUEDRAOGO

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