Lutte contre la malnutrition: la patate à chair orange comme remède

Pour Amado Ouédraogo, les enfants malnutris sont bien pris en charge dans son centre

Dans la Sissili, la patate douce à chair orange (PDCO) contribue à prévenir la malnutrition chez les enfants. Divers mets faits à base de ce tubercule leur sont proposés dans le cadre de la lutte contre ce phénomène.

Assises sous un arbre dressé au milieu d’une cour dans la ville de Léo, chef-lieu de la province de la Sissili, région du Centre-Ouest, des femmes, venues de plusieurs localités, assistent à une séance de préparation de mets à base de patate douce à chair orange (PDCO). Des ustensiles de cuisine, une bouteille de 6 kg de gaz et tout ce qu’il faut pour la cuisine est mis à leur disposition.

La PDCO, très riche en nutriments, est recommandée aux enfants pour les prémunir contre la malnutrition. Ce jeudi 10 novembre 2022, les dames sont en train de réviser leurs cours culinaires. Dans une ambiance bon enfant, chacune explique, sous le regard bienveillant du formateur Nöel Sawadogo, comment obtenir tel ou tel autre plat. Plusieurs modules leur ont été dispensés durant ces trois jours de formation.

Ce sont, entre autres, le zoom koom (à base de PDCO crue ou bouillie), le tô, le couscous, la sauce à base de feuilles de la PDCO, le dèguè, les chips, les beignets, les gâteaux, le gonré, la bouillie enrichie pour les enfants. Tous ces mets, relève M. Sawadogo, sont conseillés aux enfants, aux femmes enceintes et allaitantes. Au-delà, souligne-t-il, toute personne qui le souhaite peut en consommer.

Salamata Nébié, apprenante ayant fui le village de Béléhédé (province du Soum) pour se retrouver à Léo, semble avoir bien assimilé les cours. Ou du moins ceux relatifs à la préparation de la boisson à base de la PDCO. « Pour préparer le zoom koom à base de PDCO crue, après avoir lavé les tubercules, on les épluche avant de les plonger dans l’eau. Ensuite, on les écrase et on ajoute la menthe et le sucre avant de mélanger. Enfin, avec un tamis, on recueille l’eau, prête pour la boisson.

Concernant le zoom koom à base de patate bouillie, on épluche la PDCO avant de la plonger dans une marmite pour la faire passer à la vapeur. Puis, on malaxe la pâte de la PDCO bouillie avant d’ajouter l’eau. On la débarrasse de toutes les impuretés et on ajoute la menthe et le sucre », détaille Mme Nébié.

Le bêta-carotène dans la PDCO

Des femmes s’activent à préparer divers mets à base de la PDCO.

Elle se dit heureuse d’avoir appris à préparer des repas appétissants pour ses enfants et partant, pour toute sa famille. De retour à la maison, Mme Nébié envisage de partager ses expériences avec les autres femmes du quartier. « Cela va nous aider à maintenir la santé de nos enfants et les adultes vont en profiter également», soutient-elle. Mariétou Nabaho, venue du village de Nassirou, a elle aussi suivi avec beaucoup d’intérêt, la formation.

Elle apprécie positivement cette initiative qui va non seulement contribuer à éradiquer la malnutrition au sein de la communauté mais également leur permettre d’avoir des revenus. « De retour au village, je vais restituer les connaissances reçues à mes camarades », dit-elle. Pour Noël Sawadogo, la PDCO est un aliment très riche en nutriments, notamment en vitamine A.

De ce point de vue, note-t-il, les mets faits à base de ce tubercule sont recommandés aux enfants en vue de faciliter leur croissance. Et ces aliments, assure-t-il, permettent de lutter efficacement contre la malnutrition aigüe modérée chez ces enfants. « Vous savez que la PDCO est riche en vitamine A, une vitamine qui n’est pas synthétisée par le corps. Donc, toute source d’alimentation qui procure cette vitamine est vraiment la bienvenue car, elle participe à la bonne croissance des enfants », martèle-t-il.

Au district sanitaire de Léo, on n’ignore pas les bienfaits de ce tubercule dans la lutte contre ce fléau. Selon le chef de service nutrition au Centre médical avec antenne chirurgicale (CMA) de Léo, l’attaché de santé Amado Ouédraogo, la prise en compte de la PDCO dans la lutte contre la malnutrition est une nécessité absolue. Mais, précise-t-il, cette méthode ne concerne que les cas de malnutrition aigüe modérée dont la prise en charge se fait dans les Centres de santé et de promotion sociale (CSPS).

Au CMA de Léo, la plupart des enfants pris en charge sont des cas de malnutrition sévère. « Ce sont les cas compliqués qui sont déférés au CMA », affirme-t-il. A entendre M. Ouédraogo, la PDCO contient beaucoup de micro nutriments comme le bêta-carotène qui aide à la croissance de l’enfant. De ses explications, la malnutrition est un fléau qui touche plusieurs enfants dans la province. Malheureusement, déplore-t-il, les parents occupés aux travaux champêtres en saison pluvieuse ne les conduisent vers les centres de santé qu’en saison sèche.

Du reste, des dispositions sont prises pour assurer la disponibilité du tubercule. Parmi elles, figure le soutien des femmes en boutures, une initiative visant à leur permettre de produire elle-même la PDCO. Elles sont également bien encadrées par les agents d’agriculture, sachant que sans une bonne maîtrise des itinéraires techniques de production, tous les efforts resteront vains.

Ouamtinga Michel ILBOUDO

omichel20@gmail.com