Production de la pomme de terre : 60 000 tonnes attendues par an

Avec l’offensive agricole, la production de la pomme de terre doit atteindre 60 000 tonnes par an.

Dans le cadre de l’offensive agropastorale et halieutique 2023-2025, il est prévu de booster la production de la pomme de terre à 60 000 tonnes par an. Pour atteindre cet objectif, il faut plus de 3 milliards F CFA, 1 254 ha et 2 921 tonnes de semence. Le chercheur, spécialiste en génétique et amélioration des plantes à racines et tubercule, à l’INERA, Koussao Somé, parle des différentes variétés, des semences et des difficultés inhérentes à la filière.

La pomme de terre fait partie des huit produits à promouvoir dans le cadre de l’offensive agropastorale et halieutique 2023-2025. Pour atteindre les 60 000 tonnes prévues par an, le ministère de l’Agriculture, des Ressources animales et halieutiques compte aménager environ 1 254 ha de terrain dans toutes les régions dont 100 dans la région de la Boucle du Mouhoun, 150 dans les Cascades et à l’Est, 156 au Nord et 154 au Sud-Ouest.

Les coûts des investissements à réaliser pour cette filière sont estimés à plus de 3 milliards F CFA, supportés par les ressources publiques et le privé. Les besoins en engrais et en semences sont respectivement de 502 tonnes et 2 921 tonnes. Il faut souligner qu’en matière de semences, le pays dépend fortement de l’extérieur pour son approvisionnement.

«On n’est pas créateur de variétés non plus », déplore le spécialiste en génétique et amélioration des plantes à racines et tubercule à l’Institut de l’environnement et de recherches agricoles (INERA), Dr Koussao Somé. Selon lui, il faut attendre que les variétés tombent dans les domaines publics afin de pouvoir les inscrire dans un catalogue. Dans la première édition du catalogue national des espèces et variétés agricoles du Burkina Faso, on note 16 variétés de pomme de terre homologuées.

Elles se distinguent par la couleur (peau jaune), la chair (jaune ou jaune pâle), etc. Les rendements vont de 20 à 30 tonnes à l’hectare. C’est surtout sur les nouvelles variétés, telles que El Beida (55t/ha), Naima (98,2t/ha) et Universa (73,6t/ha), que le ministère compte pour atteindre les 60 000 tonnes par an. Ce sont des cultures à haut rendement. Selon Dr Somé, El Beida a déjà été expérimenté au Burkina Faso.

Il pense que ce sera un bond en avant, si on arrive à avoir 70-75 tonnes/ha avec Universa et Naima. Pour lui, le seul problème est que ce sont les variétés qui ne sont pas forcément bien connues de tous les producteurs du pays, ou qui sont toujours sous le couvert ou sous la protection de leur obtenteur.

La culture

Les femmes sont actives dans la culture de la pomme de terre.

Généralement le premier critère pour la production de la pomme de terre, selon le spécialiste, est le rendement. Viennent ensuite l’usage (pour faire des frites, de la purée, du ragout…), la conservation, la qualité (le jaune a plus de nutriments), etc. Par exemple, Atlas, Sahel, Spunta, Pamina sont des anciennes variétés. Bien que leur rendement soit faible (15-25 tonnes à l’hectare), elles sont toujours cultivées. Quant à la qualité, Pamina se distingue. Elle a une chair plus ou moins jaunâtre indiquant qu’elle contient plus de nutriments. La pomme de terre est produite dans notre contrée en saison sèche et fraîche.

A entendre M. Somé, la plupart de ceux qui veulent la produire, les primeurs ont déjà commencé au mois d’octobre. Les autres attendent novembre ou décembre. L’une des conditions pour la réussir est d’avoir de l’eau pour l’irrigation pendant la période de production qui dure environ 70 ou 90 jours. A entendre le chercheur, elle se cultive sur un sol pas très lourd, friable, où on peut en faire une boule.

Les grandes zones de production sont situées au Nord et à l’Ouest. Pour atteindre l’objectif de l’offensive (60 000 tonnes par an), il pense qu’il est possible de la cultiver partout dans le pays. Car, « on peut toujours corriger un sol», à son avis. Toutefois, Dr Somé évoque certaines précautions à prendre. Il faut préparer les terrains à temps, envoyer les intrants à temps, former les gens aux itinéraires techniques de production de pomme de terre et suivre les producteurs. Si toutes ces précautions sont prises, se convainc-t-il, il n’y a pas de raison qu’on ne soit pas au rendez-vous de ce qui est prévu.

Des difficultés

La production de semences est un goulot d’étranglement de la filière. Le pays n’étant pas créateur de semences, il est obligé de l’acheter à l’extérieur. Ou, selon Dr Somé, d’attendre que les variétés tombent dans les domaines publics afin de pouvoir l’exploiter. « Il n’y a pas de volet production de semences de pommes de terre au Burkina. Parce que pendant longtemps, on a dit qu’on ne peut pas. Alors qu’il faut seulement renforcer la capacité de l’INERA », dit-il. Une autre difficulté à surmonter dans la filière est le problème de conservation. Les producteurs ne disposent pas de moyens ni d’équipements pour conserver une partie de leur production.

Les infrastructures de stockage manquent. Pour éviter des pertes, ils vendent toutes les récoltes. Et plus tard, le Burkina est contraint d’importer de la pomme de terre de certains pays européens comme la Hollande et du Maghreb (Maroc). Une triste réalité qui interpelle les décideurs. Pour le chercheur, la pomme de terre doit être conservée à une luminosité réduite, un minimum d’humidité dans une température pas très élevée. L’idéal serait entre 12 et 16°C. Il reconnait que dans les provinces du Yatenga et du Bazèga, des initiatives pour la conservation sont entreprises.

Celles-ci doivent être encouragées et améliorées. « La filière pomme de terre est prometteuse », foi de Dr Koussao Somé qui indique que les choses sont en train de changer parce qu’il y a des accords avec les institutions internationales de création de variétés de pommes de terre. « On a bénéficié de 13 variétés à tester chez nous qui ne sont pas connues ailleurs. On est en train de travailler pour voir parmi elles, combien nous pouvons sortir pour nourrir notre système. Elles seront nos variétés et on va appliquer toute la chaîne de production de semences, si nous avons les capacités», espère-t-il. –

Habibata WARA